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LAMENNAIS
D’APRÈS UNE CORRESPONDANCE INÉDITE

LE PRÊTRE ET L’AMI

Un des compatriotes de Lamennais, le bénédictin dom Lobineau, auteur d’une Vie des Saints de Bretagne, rapporte qu’un vénérable religieux avait coutume d’ajouter aux litanies des Saints, qu’il récitait chaque jour, cette invocation personnelle : A furore sanctorwn libera me, Domine. Cette fureur des saints, Lamennais en a souffert de son vivant et après sa mort. De son vivant, il fut maintes fois dénoncé et calomnié avec une âpreté où les rancunes personnelles se donnaient carrière, et après sa mort, il n’y eut, pendant un demi-siècle, écrivain pieux qui ne se crût obligé d’accoler à ce nom quelque qualification flétrissante. Puis, avec le temps et sous l’influence d’idées nouvelles dans le monde catholique, une réaction s’est opérée en faveur de Lamennais et meilleure justice lui a été rendue. On s’est rappelé que, durant toute la première moitié de sa vie, il avait été un grand serviteur de l’Eglise, et l’on a reconnu que, s’il l’a répudiée avec éclat durant la seconde, il a eu cependant cette singulière fortune que, depuis sa mort, quelques-unes de ses doctrines théologiques et sociales ont été consacrées par elle. En effet, lorsqu’il se posait en champion fougueux de l’infaillibilité pontificale, il ne faisait que devancer la décision doctrinale promulguée par le Concile du Vatican, et lorsque, avant de verser, comme