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leur donner, il a été entendu de part et d’autre qu’on s’en remettrait au jugement d’un arbitre. C’est ainsi qu’il convient de faire dans un conflit où les intérêts vitaux d’aucun des deux pays ne sont engagés, et d’où il serait dès lors impardonnable de faire sortir la guerre, avec ses incertitudes et ses horreurs. On l’a compris à Berlin comme à Paris : dès lors, le conflit était terminé avant même que la cause fût entendue. Elle l’est aujourd’hui, et nous n’avons pas à nous plaindre de la sentence qui y met fin : au surplus, nous ne nous en plaindrions dans aucun cas, puisque nous avions remis notre cause entre les mains de l’arbitre. Il nous a d’ailleurs donné raison sur tous les points de droit, et n’a donné tort à nos agens que sur un point de fait. Nous devons admettre, puisque l’arbitre le dit, qu’ils se sont laisse entraîner à quelques violences inutiles dans l’effort qu’ils ont fait pour enlever les déserteurs aux agens du consulat allemand. Mais ces déserteurs, — l’arbitre le dit aussi, — appartenaient à l’autorité française qui avait le droit incontestable de les arrêter. Nous parlons des déserteurs de nationalité allemande : le gouvernement impérial avait renoncé à toute contestation au sujet des autres. En conséquence, l’arbitre n’a pas ordonné que nous nous dessaisissions des prisonniers pour les remettre au consulat allemand, et c’est là, en vérité, tout ce que nous pouvions désirer. Néanmoins l’arbitre a décidé qu’il n’y avait pas eu faute de la part des agens allemands, parce que le cas pouvait être douteux, étant donné les circonstances. Cette décision est de nature à satisfaire tout le monde, ou du moins à ne mécontenter personne, et, bien que l’arbitre n’ait certainement cherché qu’à régler la question en droit strict, il n’a pas dû être fâché d’avoir atteint ce résultat. Il ne restera, ni en Allemagne, ni en France, aucun mauvais souvenir de cette affaire : elle a montré, au contraire, que les deux pays voulaient vivre en bon voisinage et qu’ils entendaient ne pas se départir de cette intention commune à propos d’un incident secondaire et d’un dissentiment passager.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.