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Saint-Jacques de l’Épée, dont la mission était de défendre à main armée les pèlerins ; que se fondent en France des multitudes de confréries de Saint-Jacques ; et que s’élèvent enfin sur les routes un nombre incroyable d’auberges, d’asiles et de refuges.

Il y a, d’après le Guide des Pèlerins, quatre routes qui, traversant la France, se réunissent en une seule près de Pampelune à Puente la Reina. L’une partant de Paris passe par Brioude, Arles, Saint-Gilles, Toulouse, et nous avons vu s’y former la légende de Guillaume ; l’autre passe par Notre-Dame du Puy, Saint-Foy de Conques, Saint-Pierre de Moissac ; la troisième par Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, Saint-Léonard et Périgueux ; la dernière par Saint-Martin de Tours, Saint-Hilaire de Poitiers, Saint-Eutrope de Saintes, Blaye et Bordeaux. C’étaient là des sortes de voies sacrées, le long desquelles se dressaient les sanctuaires de France, et toutes conduisaient au grand sanctuaire de Galice. La première route traversait les Pyrénées au col d’Aspe ; les trois autres à Ostabat dans les Basses-Pyrénées, et toutes quatre se réunissaient près de Pampelune sur la grande voie romaine qui, par Burgos et Léon, conduisait au tombeau de l’apôtre. Or à mesure que le pèlerinage se répandait, les fondations religieuses se multipliaient et favorisaient les récits légendaires. De bonne heure on retrouve le nom de Charlemagne sur cette route qu’il passait pour avoir parcourue jadis, premier pèlerin de Compostelle, premier fidèle appelé par saint Jacques.

Dès l’année 1007, la chapelle d’Ibañeta, située à deux kilomètres de Roncevaux, prend le nom de Chapelle de Charlemagne que lui donnent les pèlerins. Au point culminant du Col de Cise, là où commençait la descente des pèlerins vers Roncevaux, se dressait la Croix de Charles. Peu à peu, et sans doute à une époque assez tardive, au commencement du XIIe siècle, se forme la légende d’une expédition de Charlemagne pour aller délivrer le sanctuaire et d’une bataille dans les Pyrénées. Roncevaux offrait d’ailleurs au pèlerin un spectacle impressionnant : après une plaine encadrée de verdure, le chemin se resserre, devient âpre, raviné, et évoque de lui-même une idée d’embuscade. Peut-être est-ce là ce qui a suggéré l’idée du combat, car l’histoire ne dit pas que Charlemagne ait passé précisément par ce défilé, et la géographie montre qu’en revenant de Pampelune il avait une