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prochain, ou l’avancement les remplacera par d’autres. On ne pouvait faire mieux. Mais si le Parlement et la loi interviennent, pourquoi ne pas avoir, au lieu de cette imitation imparfaite du Tribunal pour enfans, les juvenile courts elles-mêmes, telles qu’elles existent aux Etats-Unis ? Pourquoi ne pas établir le juge unique, qui ne juge que les enfans et qui est seul à les juger, qui est leur tuteur aussi, et qui centralise dans ses mains tous les pouvoirs relatifs à l’enfance abandonnée ou coupable ?

La réponse devrait être affirmative, semble-t-il, et le juge unique, doté des pouvoirs les plus étendus, devrait être institué, s’il ne fallait compter avec les habitudes juridiques d’un aussi vieux pays que le nôtre, avec les principes essentiels d’une législation pénale, qu’il est difficile de changer. Les Américains ont toujours eu, en matière répressive, le juge unique ; il leur était naturel de le donner aux enfans : le contraire les eût troublés. Une règle opposée nous donne, dès qu’il s’agit de délits, la pluralité des juges ; les criminalistes s’accordent à y voir une garantie très forte pour l’accusé, et, récemment, quand la réforme des juges de paix proposait d’attribuer à ces magistrats la connaissance d’un certain nombre de délits, il y eut une protestation vigoureuse qui la fit échouer. Etait-ce le moment de demander pour l’enfant le juge unique ? Ce n’est pas un juge, dit-on. — Si, il a souvent à juger, même avec des enfans ; il a toujours à juger, lorsque les enfans ont des complices adultes. Que faire dans ces cas qui sont fréquens ? Faudrait-il retirer à ces adultes la garantie de la pluralité des juges ; ou bien distraire alors l’enfant de son juge unique pour l’envoyer devant le tribunal ordinaire ?… M. Deschanel s’est inquiété de telles conséquences. Il est, d’autre part, averti par une longue expérience que, seules, ont chance d’aboutir promptement les propositions qui ne touchent qu’un détail des lois et des systèmes anciens. Pour obtenir le tribunal des enfans el pour l’obtenir vite, il a donc renoncé à viser dès à présent la perfection américaine, qui n’est peut-être, d’ailleurs, une perfection que parce qu’elle est américaine ; il a proposé simplement ce qu’on pourrait appeler la « consolidation » de la pratique de Paris : dans tout arrondissement dont le chef-lieu compte au moins 100 000 habitans, une Chambre correctionnelle sera chargée uniquement des causes des enfans. M. Deschanel ajoute, et l’idée est excellente : les membres de cette Chambre échappent au roulement annuel. Ils