Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/419

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nouvelliste un de ses « imprimés » avec une bouteille de la valeur de douze livres ; mais, bien que cette précieuse essence, approuvée par la Faculté, fût de nature à rendre les plus grands services aux officiers partant pour la campagne, l’annonce n’en avait pas été tolérée par le lieutenant de police qui exigeait un certificat favorable du premier médecin et du premier chirurgien du Roi.

Pour tous ceux qui gravitaient de près ou de loin dans l’orbite de la Cour, pour tous ceux, — et ils étaient légion, — qui attendaient d’elle faveurs, places, honneurs, privilèges, cordons et pensions, un service de nouvelles, les tenant promptement au courant de cette vie mouvante et féconde en surprises, était une nécessité. Il leur était indispensable, non seulement de connaître exactement le pouvoir ou l’influence dont disposaient les personnes en place ou en crédit, les maîtresses royales, les maîtresses des ministres, les maîtresses des « importans de Cour, » mais d’être les premiers à distinguer celles de qui la faveur se levait à l’horizon, aurore pâle encore, afin d’y courir faire la révérence et délaisser, bien ostensiblement, la favorite encore en honneur, mais sur son déclin. Relisons Mme de Sévigné. Il était nécessaire de découvrir, et du plus loin, dès son entrée dans la route menant au pouvoir, l’homme qui vient... afin de lui aller faire des protestations empressées, avant qu’il ne fût « arrivé » et, dès lors, accablé de courtisans, d’adulateurs, de quémandeurs, d’amis innombrables, et tous du plus furieux dévouement.

« Quel visage le Roi a-t-il fait à la maîtresse en titre ? Le crédit de Mme de Mailly ou de Mme de Châteauroux a-t-il baissé ? Un astre nouveau commence-t-il à poindre à l’horizon ? »

Il faut lire, pour être édifié à cet égard, les Mémoires d’un courtisan de race comme le duc de Croy. « M’étant mis au fait de la Cour, je sus que le Roi s’était abandonné tout à fait à l’amour qu’il avait pour la marquise de Pompadour,... de sorte que je m’arrangeai pour lui être présenté et être passablement avec elle. » Cheverny et Valfons s’expriment de même. « Recevoir, prendre et demander, voilà le secret en trois mots, » dira Figaro. Encore fallait-il savoir à quelles portes et à quel moment frapper.

Pour le noter en passant, par là s’explique aussi le grand