Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 52.djvu/644

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aux nouvelles reconnues certaines, en cédant parfois, quand les quatre pages de la feuille n’étaient pas pleines, à la tentation de puiser dans le registre d’à côté ; puis les paquets étaient portés aux abonnés de Paris, ou mis à la poste pour la province.

Les diverses catégories de souscripteurs recevaient des feuilles différentes : les uns, les informations politiques, celles qui concernaient le Parlement, les « affaires du temps ; » les autres, les informations littéraires et artistiques ; d’autres, les échos mondains, les « on-dit » de la ville, du théâtre et de la Cour.

Voltaire s’adresse à cette agence accréditée pour faire démentir de faux bruits répandus sur son compte :

« Protestez donc, je vous prie, écrit-il à d’Argental, protestez dans le grand livre de Mme Doublet contre les impertinens qui m’attribuent ces impertinences. »

Cette vogue et cette prospérité n’allaient pas sans revers, et le revers du nouvellisme, nous le connaissons, un gouvernement qui fronce les sourcils et mobilise ses estafiers.

Sur l’ordre du ministre de Paris, Berryer, lieutenant général de police, se rendit aux Filles-Saint-Thomas, pour faire à Mme Doublet, au nom du Roi, de sérieuses observations. Mme Doublet le reçut avec une exquise politesse ; mais vingt-cinq ans s’étaient écoulés depuis que les Paroissiens s’étaient réunis pour la première fois, Bachaumont était président au Parlement, Bernis cardinal, Mirabaud, Foncemagne, Mairan étaient de l’Académie, Sainte-Palaye des Inscriptions ; la famille de Mme Doublet arrivait au pouvoir. Berryer fit des représentations que Mme Doublet accueillit avec la bonne grâce la plus séduisante ; les Paroissiens continuèrent de tenir leurs assemblées et les bulletins de circuler ; et avec une activité nouvelle, à partir du moment où Choiseul, neveu de Mme Doublet par son mariage avec la fille de Crozat, fut placé, en 1758, à la tête du ministère.

Bien mieux, sur le tronc principal, vint se greffer un rameau qui grandit, se développa et fut bientôt d’une égale importance.

Nous avons relevé sur la liste des Paroissiens le nom du comte d’Argental, représentant en France de l’infant, duc de Parme. Il avait épousé une amie de Mme Doublet, Jeanne Bosc de Boucher, laquelle ne tarda pas à devenir pour la Paroisse une collaboratrice active.

Bachaumont et Mme Doublet récoltaient et répandaient leurs