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alliance, ni même une garantie militaire. C’était du moins, en vue des difficultés éventuelles, le gage nouveau d’une solidarité qui devait, selon toute vraisemblance, trouver l’occasion de s’affirmer au Maroc. Le mois suivant, un accord franco-japonais s’ajoutait, comme un trait d’union, à l’alliance anglo-japonaise d’une part, au rapprochement dès ce moment certain de la Russie et du Japon d’autre part, et achevait d’assurer l’équilibre asiatique, conjurant ainsi en Extrême-Orient les risques de complications, dont tant de fois en Europe nous avions subi le contre-coup. Par tous ces actes, les puissances que la crise marocaine avait opposées à l’Allemagne fortifiaient pour l’avenir leur capacité de résistance. De même qu’à Berlin on s’attachait à manifester la vitalité de la Triplice et surtout de l’alliance austro-allemande, de même, à Paris et à Londres, on s’appliquait à garantir les résultats obtenus dans la voie de l’autonomie diplomatique. Chacun restait dans sa ligne et s’y tenait avec un regain d’ardeur.

Le mécontentement provoqué dans les milieux allemands par ces événemens ne manqua pas de se manifester au Maroc, à la suite de notre débarquement à Casablanca. Il s’exprima aussi de façon plus directe. Déjà, en mai et en juin, les protocoles anglo-franco-espagnol et franco-japonais avaient été dénoncés comme suspects par la presse de Berlin. En août, l’accord anglo-russe déchaîna une vive campagne. La Deutsche Tageszeitung déclara que l’Allemagne « n’avait nul lieu d’être satisfaite de voir aplanir, entre deux autres nations, certaines difficultés qui, dans des circonstances données, auraient pu lui être utiles. » La Gazette de Francfort elle-même écrivit : « Le royaume des Indes Anglaises n’a pas été depuis longtemps aussi à l’abri vis-à-vis de la Russie qu’il l’est maintenant. Si donc l’Angleterre, sans nécessité immédiate en Asie, en arrive à cette entente avec le vieil adversaire, il en faut chercher le motif ailleurs. Il est fort probable que nous ne nous trompons pas en le cherchant en Europe. » Sans doute les notes plus officieuses de la Gazette de l'Allemagne du Nord et de la Correspondance d’Empire de l’Allemagne du Sud affirmaient que le gouvernement impérial n’avait rien ignoré et ne s’alarmait de rien. Mais les articles de critique, où était de nouveau développé le thème de « l’encerclement, » exprimaient une opinion très largement répandue.

On vit éclater cette opinion dans le chant de triomphe un