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œuvres. » Sur « l’Orient et l’Occident, » sur « le Nord et le Midi, » ce fut « une grande fraternité qui, doublant les forces morales de la Compagnie, rayonnait de Paris à Goa, » et de Rome jusqu’à la plus petite ville. On peut supposer, sans invraisemblance, que le spectacle de ces heureux efforts contribua pour quelque chose aux conceptions de M. de Ventadour et du P. de Condren, et qu’en revanche, quand la Compagnie du Saint-Sacrement eut à son tour grandi, les Jésuites n’auraient pas demandé mieux que de s’agréger une société nouvelle, analogue à leurs propres créations, et à la naissance de laquelle l’un des leurs, le P. Suffren, avait, on s’en souvient, présidé.

Mais à cette date, — 1627-1631, — la Société d’Ignace de Loyola, attaquée à la fois par les Parlemens et par des ordres religieux rivaux, était assez mal en cour. Les inspirateurs religieux soit de Richelieu, soit de Marie de Médicis, c’étaient moins alors les Pères Jésuites que le Père Joseph, capucin, que le fondateur de l’Oratoire, Bérulle. Des trois religieux qui répondirent à l’appel du duc de Ventadour, le P. Suffren, jésuite, le P. de Condren, oratorien, le P. Philippe d’Angoumois, capucin, ce fut, — bien des petits faits le marquent, — l’oratorien qui eut la plus grande influence sur l’entreprise nouvelle. Un autre membre de l’Oratoire, le frère François de Coligny, était même dans la Compagnie avant que le Père de Condren n’y fût. Plusieurs autres oratoriens, les PP. Denis Amelote, Nicolas de Braillon, J. -B. Eustache Gault, appartinrent au Saint-Sacrement dès ses origines. Et quand, un peu plus tard, le principe fut posé par la Compagnie du Saint-Sacrement de n’admettre aucun membre d’une congrégation régulière, sans doute cette exclusion louchait les Oratoriens comme les autres, — puisque, suivant l’esprit du P. de Condren, ils ne devaient pas se regarder comme un simple groupement d’« honnêtes gens » pieux, mais comme une véritable société de « personnes ôtées du monde ; » — néanmoins, quand des exceptions furent faites par la Compagnie du Saint-Sacrement, elles le furent au profit des membres de cet Oratoire dont l’esprit, toujours selon le Père de Condren, consiste à fuir tout esprit propre et particulier pour n’en avoir point d’autre que celui que Jésus-Christ a donné à son Église : formule identique à la maxime fondamentale du Saint-Sacrement. En outre, cette exclusion, et les raisons dont elle s’appuyait (en particulier l’impossibilité pour « une personne de