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LE PRINCE DE BÜLOW.

idée, en habillant d’argumens avantageux le changement soudain de son orientation parlementaire. « Le vote du 13 décembre était une attaque contre les gouvernemens confédérés et la dignité nationale. Je travaille avec tout parti qui respecte le point de vue national. Dès que ce principe est violé, il n’y a plus d’amitié possible. » La rupture ainsi justifiée, le prince expliquait pourquoi il avait accepté depuis 1901 la collaboration du Centre : « Le chancelier, surtout depuis les élections de 1903, ne pouvait pas ne pas travailler avec le Centre. Il était forcé de s’assurer son concours pour les projets de loi économiques et nationaux que l’intérêt du pays rendait nécessaires. Mais je nie absolument qu’il ait abandonné par complaisance pour le Centre les droits de l’Etat. » Restait l’avenir : le prince de Bülow l’envisageait en ces termes : « Certes, je ne crois pas que les élections créeront le grand parti libéral centralisé, qui pourrait occuper la place du Centre. Mais les fractions de la Droite, le parti national-libéral et les groupes radicaux plus voisins de la Gauche, pourraient par une tactique habile dans la lutte électorale trouver assez de terrain pour constituer une majorité de cas en cas... Malgré les différences de situation dans les circonscriptions électorales, les fractions qui ont voté le 13 décembre pour le gouvernement ne devront pas oublier ce qui les a unies ce jour-là. C’était la lutte pour l’honneur et le bien de la nation contre les socialistes, les Polonais, les Guelfes et le Centre. »

Les électeurs, par leur vote, justifièrent l’espoir du prince de Bülow. Les socialistes perdirent 36 sièges, les Guelfes, 5. Les Polonais n’en gagnèrent que 5, le Centre 2. Le gouvernement disposait ainsi de 30 voix environ de majorité. Les conservateurs avaient 5 sièges de plus que dans le précédent Reichstag. Le gain des nationaux-libéraux était de 5 sièges aussi, celui des groupes de gauche de 12. Toutefois la défaite du Centre eût été pour le chancelier plus rassurante que celle des socialistes. Car, entre Bebel et les conservateurs, il n’y avait pas à redouter de rapprochement, tandis qu’entre la Droite et le Centre une réconciliation, toujours possible, faisait peser sur le « Bloc » la menace d’une irréparable fissure. Cependant, quand le Reichstag s’ouvrit le 19 février 1907, la politique nouvelle du prince de Bulow n’y connut d’abord que des succès. Un conservateur, le comte de Stolberg-Wernigerode, fut élu président par 214 voix contre 164 à M. Spahn. Les vice-présidens