Page:Revue des Deux Mondes - 1909 - tome 54.djvu/391

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle aurait travaillé en même temps pour ses propres intérêts et pour ceux de la Suisse, mais non pas pour ceux de l’Allemagne : l’Allemagne a réussi à faire écarter des discussions ce problème dangereux. Comment les cantons gothardistes abandonnent-ils la cause de « leur » Gothard, en acceptant pour autrui des concessions telles que le gouvernement suisse est obligé de s’en excuser ? Le communiqué officiel, distribué par la chancellerie fédérale, — et donc rédigé par le gouvernement lui-même, — au lendemain de la Conférence du Gothard, plaide ainsi les circonstances atténuantes ; nous nous ferions, en vérité, scrupule de ne pas en donner un extrait textuel :


Il y a lieu de remarquer qu’il s’agit toujours du transit par le chemin de fer du Saint-Gothard, soit des tarifs pour les voyageurs et marchandises qui entrent par Chiasso et Pino d’une part et sortent par Lucerne, Zoug et Immensee d’autre part ou vice versa. La Suisse garde son entière liberté en ce qui concerne les tarifs pour les voyageurs et marchandises au service intérieur du Gothard ; de même pour les voyageurs et marchandises d’Allemagne et d’Italie à destination de stations du Gothard ou inversement.


Lisez et comprenez : il est bien entendu que tout ce qui est suisse est exclu du privilège.

Au lendemain de la « guerre des farines » qui avait révélé à bon nombre de Suisses les répercussions lointaines des méthodiques négociations commerciales de l’Allemagne, l’habile ministre de ce pays à Berne, M. de Bülow, le propre frère de l’ex-chancelier, pouvait-il escompter une aussi enviable faveur ? Les puissantes locomotives du Gothard travailleront désormais, — à partir du 1er mai 1910, — et les puissantes rotatives souffleront les neiges pour déblayer la voie durant d’interminables hivers, — non pas à perte, nous l’espérons bien, nous en sommes même assurés, — mais au rabais… pour le roi de Prusse !


II. — LE SIMPLON ET LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE DES VOIES D’ACCÈS AU SIMPLON (JUIN 1909)

Lors de cette discussion de la convention du Gothard devant les Chambres fédérales dont nous rappelions tout à l’heure quelques-uns des épisodes, — à la dernière heure de la dernière séance, le 22 juillet 1870, — un des vaincus, un député du canton des Grisons, nommé Caflisch, disait, sinon avec une très délicate élégance, du moins avec une grande vérité :