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accroissement soudain et notable des dépenses militaires, notamment des dépenses maritimes ; puis, une catégorie de dépenses nouvelles, imprévues pour nos pères, inimaginées, et qui, si l’on n’y met ordre, arrêteront, par leur excès même, l’essor national : les dépenses dites sociales.

On a invoqué ces deux catégories, l’une d’augmentation, l’autre d’ouverture de crédits nouveaux, pour justifier la taxation révolutionnaire et spoliatrice qu’on est en train d’édifier en France et en Angleterre. Cette excuse ou ces circonstances atténuantes ne peuvent aucunement être admises par un observateur sérieux.

Il faut réfléchir, en effet, que si deux causes nouvelles de considérables dépenses de l’État ont surgi, il s’est présenté, d’autre part, comme compensations, deux causes puissantes, l’une d’accroissement de recettes, l’autre de réduction de dépenses. La première, ce sont les plus-values constantes d’impôts dues à l’essor même de la richesse publique. Ces plus-values qui, en certaines années, ont atteint ou dépassé en France 100 millions de francs, fournissaient une dotation plus que suffisante pour les extensions ou les améliorations utiles des services publics. L’autre cause bienfaisante, véritable aubaine pour les budgets des grands et vieux peuples endettés, ç’a été la baisse sensible du taux de l’intérêt, permettant d’emprunter à des conditions meilleures, de substituer des emprunts nouveaux moins coûteux aux emprunts anciens, ce qui constitue le mécanisme si efficace des conversions de dettes publiques. L’Angleterre y a toujours recouru avec décision dès le XVIIIe siècle ; la France, après quelques tâtonnemens et quelques hésitations, s’est décidée aussi à en faire un usage régulier et continu, toutes les fois que l’occasion s’en présente. Il en est résulté, dans les temps récens, pour la Grande-Bretagne, les deux conversions successives des Consolidés Britanniques de 3 pour 100 en 2 3/4 en 1888 et en 2 1/2 en 1903, et pour la France les conversions successives en 1883, en 1894 et en 1902, des emprunts 5 pour 100 émis au lendemain de la guerre de 1870-71, aujourd’hui réduits en fonds 2 pour 100, ce qui, avec quelques autres opérations analogues secondaires, a procuré au budget français une économie annuelle de 136 millions.

Les finances françaises profitèrent encore dans les quinze dernières années d’une autre aubaine considérable qui eût dû