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qui jusqu’alors avaient barré la route au développement national des Polonais. Ceux-ci acceptèrent « le principe de l’union avec l’Empire russe, en se conformant aux besoins généraux de l’Etat. » Le célèbre professeur de l’université de Cracovie Marian Zdziechowski parla en russe en l’honneur de l’idéalisme russe. On jeta les plans d’une exposition panslave à Moscou en 1905, d’une banque slave, d’une confédération de journalisme slave. Dans les fêtes des sokols, des délégués furent couverts de fleurs et portés en triomphe. Le comte Bobrinsky, député russe, décida que l’on devait redemander à la Douma l’autorisation de restaurer les sokols polonais. Le docteur Grek, dans un toast au leader Maklakow, affirma que le génie slave qui avait rapproché Pouchkine de Mickiewicz unirait, après les poètes, les hommes d’action. A l’issue du Congrès, les députés russes, comte Brobrinsky, MM. Girickiy et Lwof et le général Wolodimirof, se rendirent à Cracovie et à Léopol où des banquets furent donnés en leur honneur : le général y but à la prospérité de la Pologne et le comte Bobrinsky s’écria : « Ceux qui comprennent le mal que nous nous faisons et que nous nous sommes fait sont de plus en plus nombreux parmi nous. Notre malentendu actuel doit se changer en amitié réciproque. » La presse fut presque unanime à exprimer sa sympathie chaleureuse. Le concours, l’entente slave étaient assurés, semblait-il, pour longtemps dans l’enthousiasme, — inimaginable pour ceux qui n’en ont pas vu l’expression, — qu’a suscité dans l’Europe centrale l’entrevue du roi d’Angleterre et de Nicolas IL Depuis la guerre d’Orient, elle fut le plus grand événement qui passionna l’âme slave et l’enhardit aux vastes espérances.

Mais le sentiment, et si l’on veut l’instinct de race, n’a pas été et ne reste point le seul instigateur du néo-slavisme. La solidarité ethnique, fraîchement cimentée entre Polonais et Russes, n’est pas assez unanime et profonde pour qu’il doive en résulter immédiatement rien de durable sur quoi l’on puisse fonder quelque politique nouvelle, sur quoi même les héritiers des idées d’Alexandre III puissent restaurer une politique slave. Les affaires de Serbie même, devant lesquelles, malgré tout, les Galiciens et la plupart des Varsoviens restent indifférons ou gênés, ne pouvaient suffire à resserrer le néo-slavisme, à lui donner de la validité. Il a son fondement le plus sérieux dans la conscience des nécessités économiques nouvelles qui résultent