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qui sont encore à régler. » Ces déclarations de M. de Bethmann-Hollweg ont été reprises sur quelques points par le ministre des Affaires étrangères, M. de Schoen. L’un et l’autre ont parlé de la France et de son gouvernement en termes amicaux, auxquels nous sommes d’autant plus sensibles qu’on nous en avait un peu déshabitués. L’entente est faite, elle aurait (certainement pu se faire plus tôt si on avait eu à Berlin, un peu plus de confiance dans notre sincérité. Mais il faut laisser au passé ce qui lui appartient et ne nous, occuper que du présent et de l’avenir. Nos intentions, au Maroc, sont conformes à l’Acte d’Algésiras. Nous n’y réclamons pour nous — et il faut ajouter pour l’Espagne. — qu’une influence politique supérieure, justifiée par la nature et par la proximité de nos intérêts, mais nous ne voulons la faire servir, au point de vue commercial et industriel, qu’à l’intérêt commun, dans des conditions d’égalité entre les puissances. C’est conformément à cet esprit que s’est fait entre l’Allemagne et nous l’accord du mois de février dernier : il était facile de prévoir qu’il serait bien vu de tous, car tous ont à y gagner.

La première question à régler est celle des indemnités. Le Maroc en doit aux puissances qui ont fait des frais pour le rétablissement de l’ordre sur son territoire, et aux particuliers qui ont souffert des désordres antérieurs. Pour les payer, un emprunt était nécessaire. Le Maroc ne voulait le faire que dans des conditions inacceptables. Il les aurait maintînmes obstinément, s’il avait cru pouvoir rencontrer, comme par le passé, l’appui d’une grande puissance ; mais ses espérances, ses illusions à ce sujet se sont peu à peu dissipées et la réalité lui est enfin apparue telle qu’elle est : l’entente européenne est faite aujourd’hui. Le maghzen a mis longtemps à s’en rendre compte ; il a finalement compris qu’il était seul en face de nous et que, s’il repoussait nos conditions, nous trouverions sans beaucoup de peine des moyens de nous payer directement et de payer du même coup les autres intéressés. Au moment où nous écrivons, les termes exacts de l’arrangement qui vient d’être consenti par le maghzen nous sont inconnus ; nous savons seulement qu’il existe et nous donne satisfaction. La question marocaine n’est pas réglée, tant s’en faut ; il faudra parcourir encore plusieurs étapes avant d’en venir à une solution définitive, qui doit rester conforme aux prescriptions du traité d’Algésiras ; mais, reprenant à notre compte l’expression dont s’est servi le chancelier allemand, nous dirons volontiers qu’on peut tout espérer de l’avenir, à la condition de poursuivre toujours le même but par les mêmes procédés.