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bienfaisance. Ce mode de procéder nous paraît absolument néfaste. La question est revenue plusieurs fois au conseil communal d’Ixelles. D’un rapport assez récent il résultait que, sur 99 placemens, il y en avait 16 bons, 11 assez bons, 47 laissant à désirer, 22 mauvais, 2 très mauvais, 2 douteux. — Ce qui n’est pas moins éloquent, ajoutait le rapport, c’est la comparaison, des résultats ultérieurs du placement familial et du placement dans Les orphelinats. Sur 70 orphelins (garçons) vivans, de ceux qui ont été élevés dans des familles, il n’y en a pour ainsi dire pas un qui se soit élevé au-dessus de la condition d’ouvrier ; d’homme de peine, de domestique. Au point de vue moral, 22 ont une mauvaise conduite, 3 sont devenus vagabonds, 2 seulement ont acquis une instruction suffisante pour devenir, l’un forgeron d’art, 1 autre employé de commerce. » En regard de cette statistique, le conseiller communal donnait celle des jeunes gens sortis des orphelinats. « Ici, 34 pour 100 appartiennent maintenant à la bourgeoisie ; le reste fait partie de l’élite de la classe ouvrière. On trouve parmi eux un entrepreneur de terrassemens, des patrons horticulteurs, des chefs de culture dans une école de l’Etat, un entrepreneur de jardins, un maréchal des logis de gendarmerie, un chargé de cours dans un conservatoire, un négociant, un lieutenant de l’armée, etc. » Je trouvais ces détails dans un des journaux belges les plus connus, la Gazette de Bruxelles de novembre 1900. Les études que je poursuivais moi-même au nom de l’Académie des Sciences morales et politiques me faisaient voir que cette sorte de crise du patronage agitait la plus grande partie de la Belgique et qu’à côté de quelques bons résultats bien préparés, on se plaignait d’en avoir beaucoup trop qui rappelaient ceux d’Ixelles.

De tout ce qui précède conclurai-je qu’il faut proscrire les placemens dans îles familles étrangères ? Non ; mais de tels placemens ne sont à rechercher et ils ne peuvent être donnés en modèle que quand l’enfant est assez petit pour que le lait que la nourrice lui donne remplace le sang héréditaire et crée entre sa mère adoptive et lui un lien presque aussi fort que celui qui rattache l’une à l’autre une véritable mère et son fils. Quant aux placemens d’adolescens en âge de gagner leur vie, ils ne réussissent que quand ils sont précédés, accompagnés et suivis d’un patronage qui se fasse accepter d’eux comme de ceux qui les emploient. Or, pour jouer ce rôle paternel, il ne faut ni un