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Les pins glauques où luit comme un reflet d’acier ;
Les vastes grès, jadis moraines de glacier,
Qui, de loin, sur les flancs ravagés des collines,
Imitent le chaos d’une ville en ruines ;
Là-bas, dans l’entre-deux des coteaux, par endroits,
Les routes qu’on devine aux longs bruits des charrois ;
Et toujours, vaporeux, profonds, légers, sublimes,
Les bleus moutonnemens échelonnés des cimes.

C’étaient à l’infini ces mêmes horizons,
Cet océan mystérieux de frondaisons
Sur quoi de toutes parts la vue erre perdue,
La même végétale et déserte étendue
Aux chemins dessinés à peine, où, seul, parfois,
Dans le pli d’un vallon, un village de bois
Élevait au ciel gris quelques minces fumées,
Lorsque hâtif, menant ses petites armées,
Talonnant de ses brodequins son cheval blanc,
Le casque lisse au front, le glaive court au flanc,
Aristocrate maigre et glabre, déjà chauve,
Que Rome avait vu fuir surpris de mainte alcôve,
Au visage nerveux, tendu, presque cruel
De viveur à la fois et d’intellectuel,
Courbé sous son destin qui voûtait ses épaules,
Jules César entra dans la Forêt des Gaules.


Fernand Gregh.