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Quels sont les droits du citoyen ?

De librement penser, croire, agir, s’exprimer ;
De posséder les fruits que son travail lui donne ;
D’être sûr dans ses biens et sûr dans sa personne,
Et d’opposer sa force à qui veut l’opprimer.


Qu’est-ce que la liberté ?

La liberté n’est pas cette licence impure
Qui repousse tout frein et qui hait tout pouvoir ;
Elle est le droit d’agir comme on doit le vouloir ;
La justice est sa règle, et la loi sa mesure.


Qu’est-ce que l’amour de son pays, ou le patriotisme ?

Un mouvement sublime, un élan plein de flamme,
Dont le vrai citoyen sent son cœur transporté ;
Lui seul fait les héros, exalte, agrandit l’âme ;
C’est l’enfant de l’honneur et de la liberté.


Le rapporteur Courtois n’avait pas tort déjuger ce catéchisme raisonnable, mais il exagérait en le déclarant sublime dans sa simplicité ; il aurait dû voir qu’il y avait bien du brouillamini là dedans, et que les quatrains de La Chabaussière n’étaient pas du tout à la portée de l’enfance ; ces vers d’oracle font souvent regretter la prose familière des catéchismes diocésains.

Tels furent les moyens par lesquels le Directoire s’efforça, en 1796, de vivifier l’enseignement primaire donné dans les écoles publiques, et ces moyens étaient parfaitement légitimes. Mais il ne se faisait pas illusion sur leur efficacité, et comme il n’avait pas les ressources nécessaires pour multiplier les écoles primaires prévues par l’article 296 de la Constitution, il sentait bien que l’article 300 lui ôterait la possibilité de républicaniser les générations nouvelles. Pourquoi donc ne s’est-il pas appuyé sur le clergé patriote qui l’aurait aidé à former jusque dans les moindres villages des chrétiens citoyens ? C’est que les hommes du Directoire étaient avant tout des sectaires. Au risque de frapper ses amis, il enveloppa tous les prêtres dans une même réprobation, et essaya de détruire les écoles particulières en leur suscitant des difficultés sans cesse renaissantes. On peut lire dans les ouvrages de MM. Sicard et Albert Babeau le récit de ces persécutions et de ces tracasseries, tour à tour odieuses ou ridicules, mais toujours hypocrites, comme l’avaient été sous la Terreur les attaques contre la liberté des cultes. Ainsi le Directoire imagina d’écarter de l’enseignement tous les célibataires, par