Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/900

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

250 à Bhatgaon, les deux anciennes capitales, qui l’emportent sur leur rivale par le pittoresque des antiquités où ne se mêlent pas comme ici quelques modernes innovations. Le nombre des temples de la vallée qui a donné son nom au Népal est évalué à deux mille.

Il ne me sera pas permis d’y pénétrer ; seuls me seront entr’ouverts quelques viharas et les cours au centre desquelles s’élèvent les anciens temples bouddhistes. Le Brahmanisme mure l’antre de ses dieux que je veux croire plus sombres que vraiment curieux, sauf pour le savant qui espère y recueillir des inscriptions intéressantes. Je me contenterai des « extérieurs ; » ils sont jolis de lignes et combien touffus dans le détail, avec ces merveilleuses sculptures sur bois qui ornent les moindres maisons comme les plus grandes pagodes. Celle de Talejou, la déesse mystérieuse particulière au Népal, dépend du Palais-Royal, et le domine tout auprès, sur une éminence de terrain, avec ses trois toits relevés aux angles et ses pointes de cuivre doré que le faîte détache sur le ciel parmi les grands arbres. Au-dessous, sur une haute assise en pierre de taille s’étale une inscription de dimensions colossales, composée avec toutes les langues d’Asie et dans laquelle on ne manque pas de vous signaler quelques caractères latins et deux mots français séparés par un mot anglais, attestant les prétentions polyglottes des rois Mallas : Automne winter Lhivert. Le Palais-Royal, le Durbar de Jang Bahadour, a dans son enceinte une cinquantaine de cours séparées par des portes basses faciles à défendre. Il est construit dans un médiocre style italien, mélange de brique, de pierre et de bois : ce fut, j’imagine, la première note disparate dans Katmandou. Depuis, maintes sculptures newaries ont été empâtées de blanc par les Gourkhas, dans le fâcheux dessein de leur donner un air de pierre.

Ailleurs, les vieux palais des riches seigneurs newars déroulent leurs longues façades ; des clochettes, des lampes, les kâdalos de cuivre, sont suspendues aux toits des maisons aussi bien que des temples ; parfois des frises, des objets accrochés sur des temples et sur quelques maisons, paraissent illustrer des histoires licencieuses d’une hardiesse inouïe. Evoquent-elles les amours de Vichnou et des bergères ou de Si va et de ses Sakiis[1],

  1. Les énergies de Siva.