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noires de l’oxfordien et les calcaires en dalles du crétacé supérieur, peu ou pas de forêts ; mais sur tous les autres terrains, cristallin, carbonifère, permien, schistes lustrés, nummulitique, Flysch, oligocène et miocène, forêts et gazons abondent et prospèrent. Pourquoi la Haute-Savoie, sur un quart de sa surface, de l’extrémité Est du Léman à l’extrémité Sud du lac d’Annecy, l’emporte-t-elle sur le reste des Alpes, par une magnificence de végétation forestière et pastorale insurpassable ? C’est que cette portion du département est formée par un épanouissement du Flysch, le plus fertile des sédimens alpins, qui termine là une longue bande du même terrain, caractéristique des plus belles parties du Tyrol et de la Suisse.

En Auvergne et dans le Velay, la forêt et la pelouse recouvrent d’une brillante verdure toutes les pentes granitiques et basaltiques. Dans le Rouergue, le Larzac, le Quercy, la forêt est plus rare : c’est une résultante inévitable du degré de résistance des causses de leurs plateaux. Les Pyrénées étalent une végétation forestière et pastorale plantureuse partout ; elle dérive des propriétés des terrains primitifs et primaires qui constituent l’axe de la chaîne, et des divers étages jurassiques et crétacés qui en forment les ramifications.

En plaine, on ferait les mêmes observations. Qui a protégé et protégera indéfiniment nos grands massifs contre la tentation de les convertir en cultures agricoles ? C’est encore la nature du sol. Ne voyons-nous pas en effet les confins des forêts de Marchenoir, d’Orléans, coïncider, comme ceux de la Sologne, avec un étage du miocène caractérisé par des sables argileux impropres à la prairie et aux céréales ?

Dans la France entière, sur les collines et dans les vallées, le culte de l’arbre, isolé, en bosquets ou en clôture ne s’affirme pas moins que celui des grands bois. Des futaies étagées séparent les prairies en pittoresques haies, aussi belles en Savoie, en Auvergne, en Gascogne et dans le Béarn, que dans le Lyonnais les Vosges, la Normandie et la Bretagne, si nombreuses et si rapprochées parfois qu’on dirait des forêts d’une particulière transparence. Et l’on n’en exploite que la possibilité. On n’en coupe un sujet que lorsqu’un autre le remplace. On en plante de nouveaux, s’il le faut. Les baux le prescrivent. Ces prés-bois ne courent pas de danger. Il y a trop d’intérêt à les conserver. Ils subviennent au chauffage et aux constructions, produisent des