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un itinéraire de grande étendue sans être obligé à faire escale. En vue des reconnaissances stratégiques qui leur seront confiées, on est d’accord aujourd’hui pour estimer que les aéronefs doivent pouvoir s’éloigner de leur point de départ d’au moins 200 kilomètres et y revenir sans toucher terre. Si l’on y ajoute les circuits et les zigzags qu’ils sont obligés de faire pour explorer à fond le terrain dont ils ont la surveillance ; si, de plus, on tient compte du vent qui, lorsqu’on exécute un circuit fermé, est toujours une gêne pour le navire aérien, gène qui se traduit par une augmentation de la durée du voyage, on arrive à conclure que l’aéronef militaire doit pouvoir exécuter en air calme au moins 600 kilomètres sans reprendre contact avec le sol.

Or, comment obtenir un rayon d’action suffisant ? C’est une question de capacité de transport ; on doit pouvoir embarquer à bord du navire aérien la quantité de combustible et d’huile nécessaire pour marcher pendant un temps donné. Si l’on veut exécuter 600 kilomètres avec une vitesse propre de 50 kilomètres à l’heure, un approvisionnement de 12 heures est indispensable.

A cette charge, il faut en ajouter une autre. La fonction de pilote suffit pour absorber l’attention d’un homme ; si le voyage est de longue durée, il est même nécessaire d’avoir deux pilotes qui sont alternativement de service. Pour exécuter des reconnaissances militaires, il doit donc y avoir à bord de l’aéronef des personnages tout à fait distincts de l’équipage proprement dit ; ce sont généralement des officiers d’état-major spécialement chargés des observations aériennes. Pour eux aussi, le service absorbe complètement leur attention, et, pour de longs voyages, il sera nécessaire d’avoir deux observateurs qui se reposent à tour de rôle. Nous sommes donc amenés à embarquer à bord d’un aéronef militaire au moins quatre personnes. Cet effectif est suffisant pour les aéroplanes qui n’exigent qu’un seul homme occupé à la manœuvre ; pour les dirigeables, il en est autrement ; l’expérience apprend qu’il faut avoir un mécanicien et un pilote ; avec la nécessité de la relève, l’équipage doit donc se composer de quatre hommes, ce qui avec les deux observateurs fait un total de six personnes. Les aéronefs militaires doivent posséder la capacité de transport suffisante pour porter ce personnel et l’approvisionnement nécessaire à la marche.