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ponnèse, pays d’αὐτουργόι, de gens qui travaillaient eux-mêmes. Au temps de la guerre du Péloponnèse, des riches avaient jusqu’à 50 esclaves, de modestes propriétaires en avaient un ou deux. Au IVe siècle, Athènes a compté 150 000 esclaves. L’indice le plus certain de la multiplication du nombre des esclaves à Athènes est la diminution du prix de vente. D’une manière générale, l’argent, du VIe au IVe siècle, baissa de valeur dans la proportion de 5 à 1 à peu près. Or, au temps des guerres médiques, le prix courant de l’esclave semble avoir été de 200 drachmes. On s’attendrait donc à trouver par la suite des prix beaucoup plus élevés : c’est plutôt le contraire qui se produit. Dès la fin du Ve siècle, on trouve le prix de 150-160 drachmes, et au IVe siècle il en est de même. Il ne s’agit, bien entendu, que du prix de l’esclave ordinaire : nous trouvons des prix exceptionnels infiniment supérieurs.

Par suite de cet afflux, le nombre des alliances de métèques ou d’affranchis avec des citoyens, puis l’invasion dans la cité des enfans, nés de ces unions, augmentaient toujours. Pendant longtemps, on n’avait pas eu à s’inquiéter de ce mouvement ; on encouragea même la tendance : on sait que, vers 507, Clisthène avait laissé bien des affranchis pénétrer dans la cité. Mais vers 451, on commença à se préoccuper de cette situation : le gouvernement issu de la réforme de 462-461, par suite de la paix, se trouvait alors en présence de difficultés sérieuses, ayant à subvenir aux besoins de l’agglomération urbaine toujours croissante. On porta donc, sur la proposition de Périclès, une loi dite des bâtards qu’on eut la sagesse de laisser dormir quelque temps : mais en 444, au moment où allaient commencer les grands travaux, à l’occasion d’une disette et d’une distribution de blé, les titres de tous les pauvres qui se présentèrent furent rigoureusement vérifiés, et ceux qui s’étaient frauduleusement introduits dans la cité furent vendus au profit du Trésor.

La mesure n’avait pas pour but, et n’eut pas pour effet, de décourager l’immigration qui, précisément, à ce moment recevait un nouvel élan de l’essor décisif pris par l’industrie et le commerce. Mais elle visait très délibérément à arrêter l’invasion de cette population attique (dont Périclès rêvait de faire l’élite de la Grèce) par des élémens trop souvent équivoques, venus de tous les points de l’Archipel, et de plus loin encore.