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admirable, et tout à fait en situation. S’il est vrai que le besoin crée l’organe, il ne l’est pas moins que l’organe multiplie les besoins. On peut être sûr que les délégués s’ingénieront pour avoir quotidiennement quelque chose à demander et qu’ils ne resteront jamais à court. S’ils le faisaient, ils seraient bientôt remplacés ; mais ils tiendront à cœur d’avoir sans cesse des réclamations à présenter et de justifier par-là l’institution dont ils seront les représentans. Et l’on conférera indéfiniment dans les conférences périodiques ! Comme on ne se mettra pas toujours d’accord, « au deuxième degré, le projet institue des comités locaux de conciliation, » où l’on reprendra la conférence interrompue ; et comme, là encore, on ne s’entendra pas toujours, « au troisième degré est institué un Comité central de conciliation, qui peut être saisi des différends collectifs non résolus par les comités locaux. » Est-ce tout ? Non. Ne fallait-il pas prévoir le cas « où le Comité central de conciliation n’aurait pas réussi dans l’accomplissement de sa tâche ? » On le prévoit donc et ici finit la conciliation pour commencer l’arbitrage dont voici la procédure. « Chacune des deux parties désigne ses arbitres. Ceux-ci choisissent trois autres arbitres, soit par voie d’accord, soit par voie de tirage au sort sur une liste dressée de la manière suivante : Chaque année les deux Chambres dresseraient une liste de membres choisis parmi certaines catégories : Conseil d’État, Cour de cassation, Cours d’appel, Académie des Sciences, Académie des Sciences morales et politiques. La Chambre désignerait deux tiers des membres de la liste et le Sénat le tiers restant. Le tribunal arbitral ainsi constitué rendrait sa sentence qui deviendrait exécutoire, sauf pour le cas où cette sentence aurait une répercussion financière. Dans cette dernière hypothèse, elle devrait être soumise à la ratification du Parlement. » Pourquoi dans cette dernière hypothèse seulement ? Soyez sûr qu’une fois entré dans une si belle voie, on ne s’arrêtera pas à moitié route. Le Parlement n’admettra pas qu’on lui fasse sa part. Est-ce que les interpellations qui s’y produisent le plus souvent, au sujet des chemins de fer, portent sur les questions d’argent ? Point du tout, et sans aller plus loin, celle d’hier a porté sur la réintégration des révoqués. Presque toujours d’ailleurs les revendications des cheminots auront, si elles sont admises, des répercussions financières ; presque toujours dès lors, l’affaire se terminera au Palais-Bourbon et au Luxembourg. Ainsi, au bout de cette échelle ascendante de comités délibérans, apparaît le Parlement dont l’intervention finale, sollicitée dans un cas spécial, s’étendra bientôt à tous. Faut-il l’avouer ? Lors de la dernière