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ils secondèrent avec ardeur, chacun dans ses limites, une entreprise qui tendait à relever leur condition et à les enrichir. Les premiers résultats obtenus furent de nature à encourager propriétaires et paysans. Ceux-ci, qui n’avaient encore joui que de la sécurité, commencèrent à connaître le bienfait d’une aisance modeste, mais solide, et ils s’intéressèrent de plus en plus à la production et à l’amélioration de la terre ; ceux-là consacrèrent leurs bénéfices à étendre sur leurs domaines la culture intensive, à mesure que le permettaient les conditions du sol, et à créer de nouvelles métairies.

Tous les terrains, en effet, et toutes les cultures ne se prêtent pas à l’exploitation en mezzadria. En Romagne, les terres basses, qui proviennent d’alluvions récentes, sont cultivées en prairies et en rizières ; elles ne sont point réparties en tenures permanentes, et les propriétaires n’y construisent pas de maisons de ferme. Au commencement de chaque saison, ces terres sont louées, par parcelles, à des ouvriers agricoles, qui reçoivent, pour prix de leur travail, un tiers du produit : on les appelle terziarii et le contrat qu’ils passent avec le propriétaire porte le nom de terzeria. À la différence du mezzadro, le terziario ne réside point sur le fonds, il ne possède pas de bétail, et n’a d’autre droit sur la terre que le droit essentiellement temporaire qui résulte de son contrat. L’exploitation des basses terres de la région de Ravenne en rizières et en prairies fournit un travail abondant, mais irrégulier, aux paysans qui, n’étant pas métayers, s’employaient à la journée, comme ouvriers agricoles, passant d’un domaine à l’autre, et louant leurs services aux propriétaires ou aux mezzadri. Ces ouvriers se groupèrent alors aux environs des terres dont ils avaient obtenu la concession, ou bien allèrent augmenter dans les villes la population des faubourgs. De tout temps, les journaliers ou braccianti avaient été considérés comme d’une condition inférieure à celle des métayers (mezzadri ou contadini) ; ils n’avaient pas de résidence fixe et vivaient au jour le jour, souvent incertains du lendemain. Pourtant les métayers qui les employaient leur faisaient ordinairement bon accueil : en hiver, les chaudes étables des fermes réunissaient à la veillée braccianti et contadini. Les travaux d’amélioration entrepris par les propriétaires et l’introduction des nouvelles cultures eurent pour résultat d’augmenter rapidement en Romagne le nombre des braccianti :