Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/167

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

où le fonctionnement même des lois de Mai amènerait la Prusse à en déposer quelques-uns. Mais on pouvait prévoir qu’ils continueraient à se considérer comme les pasteurs légitimes et que chacun de leurs prêtres, chacun de leurs fidèles, persistant à les traiter de pasteurs, deviendrait un rebelle. À l’avance Falk voulait sauver l’État contre ces contagieuses désobéissances.

Il y aurait alors à prendre deux séries de mesures. D’une part, il faudrait astreindre ces personnalités épiscopales à un effacement définitif ; des mesures d’internement ou d’expulsion du territoire paraîtraient peut-être indispensables ; Falk prévoyait qu’un jour ou l’autre on les demanderait au Reichstag, seul compétent pour porter atteinte à l’indigénat des citoyens allemands. Mais, d’autre part, le Landtag pouvait dès maintenant chercher les moyens nécessaires pour contraindre les bureaux épiscopaux, les curés, les vicaires, de rompre effectivement tous rapports avec les prélats dont l’État ferait ainsi justice. Le projet de loi que présentait Falk stipulait qu’après la déposition d’un évêque, le président de la province inviterait les chanoines à nommer un vicaire capitulaire qui devrait dans la quinzaine prêter serment à l’État. Ainsi l’évêque que l’État ne reconnaissait plus devait, pour les chanoines, être comme mort.

Le projet de loi pressentait leur refus ; alors le revenu de leur dotation de chanoines leur serait supprimé, et l’État, d’ailleurs, se réservait le droit de payer, comme par le passé, ceux des chanoines dont l’esprit lui plairait et qui ne lui paraîtraient pas complices de la rébellion. Puis un commissaire d’État surviendrait, prendrait sous sa garde tout le temporel de l’évêché, et devrait être considéré par le clergé du diocèse, pour tout ce qui concernerait la haute surveillance du temporel ecclésiastique, comme l’administrateur légal. Dans les paroisses soumises au droit de patronat, les patrons pourraient, durant l’administration du commissaire, pourvoir les cures vacantes en y nommant des prêtres qui répondraient aux conditions fixées par la loi de 1873. Dans toute autre paroisse privée de curé, dix électeurs pourraient provoquer la convocation de tous les paroissiens et faire nommer par eux un curé. Ainsi le projet de loi visait à faire combler soit par les patrons, soit par le peuple lui-même, les vides qui se produiraient dans les diocèses ; il prétendait assurer à nouveau, dès le lendemain de la déposition de l’évêque, le fonctionnement normal de la vie ecclésiastique.