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pouvaient aspirer les représentans du droit nouveau, créé par les lois de Mai : tout autre espoir leur était interdit.

À Berlin, devant les résistances que l’on rencontrait, on ne disait plus : l’Eglise cédera, mais on disait : l’Église traitera. « L’Empereur, disait Bismarck à Hohenlohe le 24 octobre 1874, ne peut faire aucun pas en arrière. Il sera facile au prince héritier de faire la paix. » Quelques pages que griffonnait alors le prince héritier attestaient que, le cas échéant, il ne se refuserait pas à cette besogne : sans condamner en aucune façon les principes, inacceptables pour l’Eglise, au nom desquels avaient été faites les lois de Mai, il rêvait de transactions avec Rome, qui, tout en maintenant ces lois, apaiseraient la guerre ; et pour l’heure, il était fort aise de ne supporter aucune responsabilité dans les troubles religieux de l’Empire.

Forckenbeck, aussi, le président national-libéral du Landtag, caressait l’idée d’un compromis. Il jugeait dangereux qu’on entrât en pourparlers directs avec les évêques ; mais pourquoi Windthorst et Miquel ne s’aboucheraient-ils pas ? Hohenlohe lui-même conseillait à Gelzer d’aller à Berlin pour causer avec les ultramontains.

Ainsi l’État qui avait la force semblait, à certaines heures, en proie à une lassitude, tandis que du côté de l’Eglise, qui représentait la faiblesse, on constatait une allègre vaillance ; et ce qu’on n’osait pas dire, mais ce que plusieurs pensaient, c’était que le modus vivendi souhaité, même si Bismarck y aspirait, risquerait encore d’être retardé par les souvenirs amers et par les ressentimens accumulés qui s’attachaient à la personnalité du chancelier, considéré par les catholiques de l’Empire comme l’implacable ennemi.


IX

À la Cour, à la Chambre, les têtes pouvaient travailler, c’était de lui seul, et toujours de lui, que la paix ou la guerre dépendaient. Ses volontés incohérentes et passionnées demeuraient les vraies souveraines. On espérait qu’au Reichstag la session d’hiver serait calme ; elle fut, par son fait, turbulente et brouillonne. Les votes catholiques sur certaines questions militaires et financières commencèrent d’exciter sa fureur ; Lorsqu’on discuta, le 21 novembre, sur l’arrestation de trois députés