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Victor-Emmanuel fit savoir à Napoléon III, par une lettre autographe, que le retrait des troupes serait bien accueilli, mais il ne lui cacha pas, dans un télégramme confidentiel, qu’il n’en serait pas de même de l’alliance et qu’il ne pouvait s’avancer comme il l’eût désiré, tant que ses ministres ne seraient pas revenus à son opinion ou qu’il n’aurait pas changé de ministère. La lettre sur l’évacuation était ainsi conçue : « Monsieur mon frère, Votre Majesté Impériale m’annonce son désir d’exécuter de son côté la Convention du 15 septembre 1864 dont mon gouvernement accomplit exactement les obligations. L’Italie, comptant toujours, de la part de Votre Majesté Impériale, sur la détermination qu’elle veut bien prendre aujourd’hui, n’a jamais dénoncé la Convention du 15 septembre. Votre Majesté ne peut donc pas douter qu’elle ne continue à en remplir les clauses, confiante dans une juste réciprocité de la France à observer ses propres engagemens. Je renouvelle les assurances de l’inviolable amitié avec laquelle je suis, monsieur mon frère et ami, de Votre Majesté Impériale, le bon frère et ami. » (De Florence, 20 juillet.)

Le télégramme du lendemain disait : « Je fais partir ce soir la lettre au sujet de l’évacuation. Que Votre Majesté ne s’étonne pas des termes généraux dans lesquels elle est conçue, car pour arriver à la réalisation de nos projets, je suis obligé de ménager les susceptibilités d’un ministère formé dans un but pacifique, et que la rapidité des événemens m’a empêché d’amener aussi promptement que je l’aurais désiré à nos anciens projets. Vimercati part ce soir pour Vienne. Türr est attendu. Que Votre Majesté ait confiance en moi, qui suis et serai toujours son meilleur ami. » (De Florence, 21 juillet, 8 heures soir.)

Les ministres français durent être consultés à leur tour. L’Empereur était alors à Metz et ce fut sous la présidence de l’Impératrice que la question fut débattue. Louvet et Plichon s’opposèrent à l’évacuation du territoire pontifical ; l’Impératrice y répondit avec une éloquence entraînante qui nous dispensa, Gramont et moi, de toute intervention. Elle allégua la nécessité qui ne nous laissait pas le choix : sans alliance avec l’Italie, pas d’alliance avec l’Autriche ; pouvions-nous nous priver d’un tel secours ? Si les Italiens ébranlaient par une nouvelle agression le pouvoir temporel, ce succès des révolutionnaires ne serait que passager, car la France victorieuse, affranchie de