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appuyé près de l’Empereur et au Conseil les protestations de Mackau et de ses amis et soutenu qu’il fallait maintenir notre occupation. Ce fut au contraire sur son éloquente démonstration que le Conseil, ne tenant aucun compte des représentations de tant de nobles catholiques, approuva l’évacuation du territoire pontifical. Dans l’affaire des alliances comme dans les autres, le Conseil n’a suivi l’avis de l’Impératrice que lorsque c’était son propre avis. Il n’a jamais subi de sa part une influence qu’elle n’avait sur aucun de ses membres et qu’elle n’a d’ailleurs jamais tenté d’exercer. C’est le Cabinet, non elle, qui doit être tenu responsable de la conduite suivie dans cette négociation.

Le ministère, en refusant de livrer Rome à l’Italie ou en consentant à la lui laisser prendre, a-t-il préféré Rome à la France et s’est-il rendu responsable de la perte de l’Alsace et de la Lorraine ? S’il avait préféré Rome à la France et s’il eût été catholique ultramontain avant d’être patriote français, il n’eût jamais retiré nos troupes de Civita Vecchia, car il ne se faisait aucune illusion sur la faible protection qu’était la Convention de septembre contre l’invasion italienne. Dans des temps calmes, comme en 1867, cette convention n’avait pu protéger le territoire pontifical ; combien plus eût-elle été inefficace au moment où la guerre nous paralysait ! Ce qui allait survenir aussitôt notre départ était facile à prévoir. Dès que nous nous serions engagés sur le Rhin, des mouvemens insurrectionnels eussent éclaté dans l’État du Pape ; quelle que fût la bonne volonté des ministres italiens de fermer la frontière, ils n’y eussent pas réussi. Mazziniens, Garibaldiens eussent glissé entre les mailles du réseau militaire, et se fussent reformés sur le territoire pontifical. Une insurrection dans Rome eût secondé cette invasion et les troupes pontificales étant impuissantes, les troupes italiennes se seraient rendues maîtresses du double mouvement avec peu d’efforts, car, à l’exception de quelques héros, les envahisseurs n’étaient qu’une cohue de lâches fanfarons. Qu’aurions-nous fait alors ? Aurions-nous interrompu la guerre sur le Rhin pour venir mettre les Italiens à la raison sur le Tibre ?

L’Impératrice et Gramont étaient convaincus que, la guerre terminée, il nous eût été facile de rétablir la souveraineté pontificale si elle avait été révolutionnairement abolie. Ils ne se