Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/906

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Un cri mince et ténu parvient jusqu’à notre âme.
Contemplons. Oublions tout ce qui nous brûlait,
Et, calmes, préférons pour un jour, loin du drame,
Aux minutes d’ardeur les heures de reflet.

Ce qu’on nomme plaisirs, ce ne sont que les voiles
De la mélancolie ; elle en porte beaucoup,
Danses, rires furtifs, chansons sous les étoiles,
Que saisit le désir, que jette le dégoût ;

Mais le dernier d’entre eux avant qu’elle soit nue,
Le plus subtil de tous, le plus aérien,
Et qui sur elle n’est qu’une écharpe ténue,
C’est d’être paresseux dans un parc ancien.

Jouissons prudemment de cette vague extase
Où le soleil lui-même est un fantôme errant,
Et comme sur un corps une suprême gaze,
Ne le soulevons pas, ce plaisir transparent !

Défaisons-nous. Cédons, puisque rien ne résiste.
Il est doux de rêver, et dans cette langueur
Inerte, sans savoir même si l’on est triste,
D’abolir un instant la forme de son cœur.



ÉCRIT SUR LES MONTS OMBRIENS


O toi dont les instans sont pleins de découvertes,
O voyageur, rêveur, seul homme sans prisons,
O dernier possesseur des demeures désertes,
O conquérant des horizons,

Toi qui, comme un dévot dans ses pèlerinages,
En des temples divers recherche un Dieu pareil,
Ne t’es jamais lassé, dans mille paysages,
D’adorer le même soleil,