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Les oliviers ténus, si sages d’habitude,
Écument follement sur le mur de l’enclos
Qui, presque submergé sous leur inquiétude,
A l’air d’un môle dans les flots.

Seul l’arbre monacal que nul vent ne peut tordre,
Le cyprès, reste calme en ce ciel agité,
Et ne renonce point, malgré tout ce désordre,
A son vœu d’immobilité.

Une rumeur épique emporte les haleines
Des jardins, des buissons, des vergers délicats,
Et les monts dilatés semblent au fond des plaines
Les orgues de tout ce fracas.

Je vous salue, ô vents, libérateurs du monde,
Vous qui, hors de l’ornière épaisse du brouillard,
Vers des plateaux d’azur où le soleil abonde,
Tirez la terre comme un char,

Vous qui, penchant sur nous vos figures outrées,
Soufflant votre délire aux arbres envahis,
Faites rire aux éclats dans les forêts lustrées
La face folle des pays,

Saints Georges qui tuez des dragons de fumées
Sur les villes, vous qui, dans l’espace exalté,
Mêlez si bien, parmi vos tumultes d’armées,
La fureur à la pureté,

Vous dont les cris aigus, jetés sur la chaumière,
Criblent comme des traits son toit couleur de miel,
O vous qui, violens amans de la lumière,
La déshabillez en plein ciel,

O vous qui secouez la grenade et la pomme
Et qui froissez la ronce en rasant le terreau,
Et qui jouez autour de la montagne, comme
Des enfans autour d’un taureau,