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alors que Cambon, le ministre des Finances de la Convention, pousse les comités aux pires rigueurs comme au plus efficace moyen de se procurer des ressources :

— Voulez-vous faire face à vos affaires ? s’écrie-t-il ; guillotinez ! Voulez-vous payer les dépenses immenses de vos armées ? guillotinez ! Voulez-vous amortir les dettes incalculables que vous avez ? guillotinez ! guillotinez !

C’est de la même préoccupation que s’inspire l’esprit de conquête qui fait marcher les armées françaises sur les territoires étrangers. Les représentans du peuple qui les poussent et surveillent les généraux, allèguent la nécessité de faire la guerre aux rois et de répandre par toute l’Europe les doctrines nouvelles dont la France a été le berceau. Mais, en réalité, c’est de l’argent qu’on veut, c’est de l’argent qu’on cherche. En l’année 1793, en effet, le Trésor est aux abois. Cambon ne trouve de numéraire contre assignats qu’à 55 pour 100 et plus tard à 100 pour 100. La conquête de la Hollande et celle de la Belgique sont entreprises, afin de parer à la détresse financière. Au mois de mars, les conquérans procèdent à Bruxelles comme ils procéderont partout ailleurs : ils mettent la main sur les caisses publiques ; les communautés religieuses sont proscrites : on séquestre leurs biens mobiliers et immobiliers et tout ce qui est monnayable, vases sacrés, ostensoirs, chandeliers d’argent, reliquaires, lampes d’autel, est transporté à Lille et mis au pilon. L’église de Sainte-Gudule est livrée au pillage et à toutes les atrocités sacrilèges d’une soldatesque que les chefs, s’inspirant de l’esprit des représentans du peuple ou redoutant d’être blâmés par eux, ne cherchent même pas à contenir.

Ce qui se passe en Belgique se renouvellera ailleurs, jusqu’à la fin du Directoire et même au-delà, tant que le permettront les victoires de nos armées. En juin 1797, la République Cisalpine et Ligurique est proclamée ; en janvier 1798, la République Batave ; en février de la même année, la République Romaine ; en avril, la République Helvétique ; en janvier 1799, la République Parthénopéenne, et partout les procédés sont les mêmes : confiscation ou séquestre des domaines publics, des biens du clergé ; arrestation des particuliers riches ; création de clubs dans lesquels on appelle la lie de la population, organisée révolutionnairement, afin de terroriser ceux qu’on veut dépouiller.

A Paris, comme dans les provinces, on ne procédera pas