Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/383

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les sentimens contre-révolutionnaires dont témoigne cette lettre étaient accablans pour l’infortuné qui l’avait signée et le firent impliquer dans la conspiration imaginaire inventée contre les Magon. Il était déjà compromis par les démarches auxquelles il s’était livré, le banquier arrêté, pour obtenir sa mise en liberté. Il est bien probable que c’est lui qui rédigea et fit signer par quatorze notables l’attestation suivante : « Nous citoyens de la section de la Montagne, attestons et déclarons ne rien connaître dans la conduite du citoyen Magon de la Balue qui soit contraire aux principes d’un bon républicain et que nous lui avons toujours vu remplir avec zèle les devoirs de citoyen. Nous nous joignons donc avec plaisir à sa famille pour demander avec elle l’élargissement dudit citoyen, sauf à lui laisser des gardes et à prendre à son égard toutes les mesures de sûreté nécessaires. » Il ne fut pas fait droit à cette requête. Dans la pensée du Comité de Sûreté générale, les Magon devaient périr. Quant à Coureur, il était destiné à périr avec eux.

Le banquier, après avoir vu mettre les scellés sur ses bureaux, avait été conduit à la Force. Sa santé, affaiblie déjà par son âge, ne pouvait que se ressentir de l’inique traitement qui lui était imposé. A peine emprisonné, il tombait malade. Le 24 brumaire (14 novembre), on demandait en son nom à la Convention son transfert dans une maison de santé. La pétition, qu’accompagnait un certificat des citoyens Thierry et Soupé, médecin et chirurgien ordinaires des prisons, était renvoyée au Comité de Sûreté générale. Dès le lendemain, le Comité décida que le « citoyen Magon serait transféré de la maison d’arrêt de la Force en la maison de santé établie sous l’inspection de l’administration de la police de la rue de Charonne. » Il était dit qu’il y resterait en état d’arrestation « sous la responsabilité corporelle du citoyen Belhomme, propriétaire de ladite maison et commandant de la force armée de la section de Popincourt, jusqu’à ce qu’il en soit autrement ordonné et à la charge par ledit Belhomme de représenter ledit Magon à toute réquisition des autorités constituées, ce à quoi il se soumet. » Nous ignorons pour quel motif et quelle cause l’infortuné ne resta que deux mois dans la maison de la rue de Charonne et si c’est sur sa demande ou autrement que le 27 nivôse (16 janvier 1794), il fut transféré dans celle du citoyen La Chapelle, rue de la Folie-Renault, section de Popincourt. Toujours est-il que c’est là qu’il fut