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802 REVUE DES DEUX MONDES. Prince-Fidèle, — Elle n’était pas cachée comme la vôtre. L’IaiPÉRATRiCE, toiijoiirs très vife. — Et des vètemens ensuite, pour fuir dans la campagne où l’ennemi rôde. (Touchant sa robe de guerrière.) Pas avec ceux-là? PBiNCt-FiDÈLE. — Des dépouilles d’ennemis nous serviront à souhait... La terre doit en être jonchée... L’Impératrice. — Pour vêtir votre Impératrice, des loques arrachées à quelque cadavre qui se décompose... Soit! même à cela je consens... Mais, pour vivre, dans ces couloirs de tom- beau, pour durer, quand on n’est pas encore des ombres, il faut manger, vous savez bien!... Les derniers grains de riz, je les ai partagés ce matin avec vous et mes soldats!... Alors, quoi?... Prince-Fidèle, indiquant le tombeau. — Les gâteaux sacrés, là, sur la table des morts. L’Impératrice. — Horreur et sacrilège! Lumière-Voilée. — Il n’y a pas de sacrilège, quand il s’agit de sauver la Dynastie Lumineuse... Les Mânes augustes vien- dront eux-mêmes vous convier au repas; notre sacrifice nous les rendra indu geus et favorables. L’Impératrice, leiiie, tout a coup. — Ainsi, je serai celle qui vivra dans les froides ténèbres, avec l’incertitutle d’en sortir jamais; je serai celle qui se traînera comme une larve dans les souterrains peuplés de fantômes, mangeant à tâtons les offrandes pieuses qui se dessèchent sur les autels des morts... Oh! oui, c’est plus épouvantable que de mourir ici... Alors, j’accepte... Enaineiiez-moi, je suis résignée!... Le vëillkuk, du haut du mur. — Ils ont arrêté leur marche, les Tartares... Un petit groupe seul s’avance en courant, sans armes, portant des écriteaux sur des hampes... Malgré l’obscu- rité, on dirait les signes qui accordent grâce. L’Impératrice. — Ah! la grâce imposée... serait plus insul- tante encore... Dans ma tombe emmurez-moi, prince, avant qu’ils soient ici!... Princk-Fidele, désignant Lumière-Voilée. — Votre conseiller et moi-même, nous vous suivrons dans ces demeures (Désignant les filles dhotineur), et peut-être deux de pes jeunes filles, si elles se sentent assez fortes pour l’épreuve.