Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/896

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gouvernement. Mais, avec le développement de l’instruction occidentale et l’augmentation du nombre des déclassés, les aspirations du Contres national se modifièrent bientôt. Il devint une tribune démagogique où les « extrémistes, » à la suite des Tilak, des Bepin Chandra Pal, des Banerjee, des Arabindo Ghose, cherchèrent une facile popularité par la vivacité de leurs réclamations, l’aigreur de leurs critiques, la surenchère de leurs promesses. Exaltés par le souvenir de lectures mal digérées, par des opinions déformées sur la Révolution française, ils prétendaient faire du Congrès une copie, des Etats généraux de 1789, plus tard de la Convention nationale, avec son cortège de massacres et de proscriptions, tandis que l’élément modéré, sous la conduite des Naoroji, des Bohari Ghose, des Gokhale, évoluant à son tour, voulait obtenir une sorte de reconnaissance officielle, devenir un véritable Parlement consultatif, dont l’action directrice s’étendrait sur toutes les affaires de l’Inde.

La question de l’adhésion solennelle du Congrès à la doctrine du boycottage des produits anglais, conséquence naturelle du swadeshisme, rendit éclatante une scission inévitable, qui confirma l’impuissance irrémédiable de l’Assemblée. Les modérés avaient perdu toute influence, ils étaient annihilés par une minorité violente à qui le pugilat tenait lieu de raisons. En 1906, au Congrès de Calcutta, le vieux Naoroji avait fait vainement appel à la concorde ; en 1907, à la réunion de Surate, les Extrémistes, excités par Tilak, envahiront la tribune et dispersèrent l’Assemblée. En 1908, à Madras, les modérés siégèrent seuls, le gouvernement ayant interdit la réunion particulière projetée à Nagpur par leurs adversaires ; ils s’affirmèrent ardens loyalistes et réclamèrent de nouveau la suppression de la division du Bengale en deux provinces ; émettre un pareil vœu, c’était « fouetter un cheval mort. » Le Congrès de Lahore, en 1901), passa presque inaperçu ; celui d’Allahabad, en 1910, a dû un léger regain de popularité à l’Exposition ouverte en même temps dans cette ville. On peut désormais affirmer que le Congrès national est mort de ses discordes, et surtout de l’Indian Councils Act.

Les politiciens notoires, dont l’éloquence et l’enthousiasme animaient ses séances, abandonneront ses réunions stériles pour tenter de concourir à l’éclat et aux travaux des assemblées législatives régulières. Conseils provinciaux et Conseil impérial