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Chambre des Communes. M. Asquith y a fait une réponse pleine de bon sens, de mesure et de fermeté : elle mérite d’être reproduite intégralement. « Actuellement, a-t-il déclaré, j’ai peu à dire au sujet des négociations entre les Puissances. Mais je désire qu’on comprenne nettement que le gouvernement de Sa Majesté estime qu’une situation nouvelle est survenue au Maroc, situation dont les intérêts anglais peuvent être plus affectés par ses futurs développemens qu’ils ne l’ont été jusqu’ici. Nous avons confiance qu’une discussion diplomatique trouvera la solution de cette question et, dans la part que nous y prendrons, nous aurons les égards requis pour la protection de nos intérêts et par l’accomplissement de nos engagemens contenus dans notre traité avec la France, qui est bien connu de la Chambre. » Rien de plus clair, ni de plus légitime que cette réponse, car l’action allemande, à supposer qu’elle se développe au Maroc, sera une menace pour l’Angleterre presque autant que pour nous. Pour le moment, que demande donc l’Angleterre ? Elle demande à participer à toute conversation qui aurait lieu sur le Maroc ; elle n’admet pas, comme s’exprime le Times, que ces conversations se passent derrière son dos. Ce désir est trop légitime pour qu’il n’y soit pas fait droit et, au surplus, devant sa manifestation, nous ne nous prêterions pas nous-mêmes à une conversation à laquelle l’Angleterre ne participerait pas. Mais la Russie, mais l’Espagne, mais d’autres Puissances encore ? Plusieurs d’entre elles peut-être demanderont aussi à être entendues. Toutes celles qui ont pris part à l’Acte d’Algésiras peuvent invoquer à cet égard un droit égal. L’invoqueront-elles ? Alors la Conférence renaîtra de ses cendres. Les journaux allemands protestent contre cette perspective qui ne leur sourit guère, ce qui se comprend sans peine, car ils n’ont pas gardé un bon souvenir d’Algésiras. Le mieux, disent-ils, est de se mettre d’accord par des conversations directes entre les principaux intéressés. Nous n’avons pas d’objection fondamentale contre cette manière de procéder, nous bornant à dire que toute initiative particulière, prise en dehors de tout concert avec les autres Puissances, aurait peu de chance d’être approuvée et qu’elle risquerait dès lors d’avoir un caractère assez précaire. On peut se demander quelle serait, dans cette consultation entre les Puissances, la situation de l’Espagne. Si, lorsqu’elle est allée à Larache et à El-Ksar, elle a rencontré quelque approbation ou quelque sympathie en Allemagne, elle a bien rendu ces sentimens à celle-ci après l’affaire d’Agadir. Il y a eu alors, dans les journaux espagnols, une véritable explosion de joie, comme si la