Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 6.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fatigue, soit par résignation, une accalmie se produise dans l’opinion : et il en profitera pour accepter plus ou moins explicitement des faits accomplis sans retour. Quoi qu’il en soit, l’Italie restera maîtresse de la Tripolitaine : c’est une vérité politique avec laquelle tout le monde désormais doit compter.


Les graves événemens qui se passent en Chine méritent plus d’attention que nous ne pouvons leur en donner aujourd’hui : au reste, ils sont encore tout au début d’une évolution dont on ne pourrait sans témérité vouloir prédire les étapes. Il y a des Jeunes-Chinois comme des Jeunes-Turcs, et il y a en Chine, ou du moins dans une grande partie du pays, un gouvernement à peu près aussi détesté que l’était celui d’Abdul-Hamid. Encore le vieux sultan était-il un descendant du Prophète et le représentant d’une dynastie nationale, tandis que la majorité de la Chine supporte impatiemment une dynastie étrangère, la dynastie mandchoue. Des insurrections ont éclaté plusieurs fois. Celle d’aujourd’hui paraît être plus redoutable que les précédentes : les premiers succès des rebelles sont de nature à leur attirer beaucoup d’adhésions. Leurs progrès sont rapides. Cependant ils reconnaissent eux-mêmes la nécessité et l’imminence d’une nouvelle bataille qui aura une grande influence sur la suite du mouvement. Ils proclament très haut que ce mouvement n’a rien de xénophobe : il n’est pas tourné contre les étrangers, et ceux-ci n’ont rien à en craindre. Jusqu’ici, ces assurances n’ont pas été démenties par les faits. Les puissances prennent néanmoins des mesures pour protéger leurs nationaux dans le cas où cela deviendrait indispensable, mais elles commettraient certainement une imprudence si elles intervenaient sans une absolue nécessité. Attendons.

Francis Charmes.
Le Directeur-Gérant,
Francis Charmes.