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Nous sommes également d’accord pour ce qui concerne la France.

Pour le reste, permettez-moi maintenant de vous soumettre quelques questions :

Croyez-vous que l’Autriche vous soit toujours amie ? Pour le moment, elle a besoin de vous, elle-même se trouvant forcée de réparer les dommages subis en 1866, et vous seul pouvant lui assurer la paix sans laquelle il lui serait impossible de remettre l’ordre dans ses finances et de reconstituer son armée. Mais l’Autriche ne peut pas voir d’un bon œil le nouvel Empire d’Allemagne.

Vous dites que l’Allemagne n’a aucun intérêt dans la Question d’Orient. Soit, et cependant vous devez vous rappeler que le Danube est, pour une bonne partie, un fleuve allemand ; il baigne Ratisbonne, et c’est par la voie du Danube que les marchandises allemandes vont à la Mer-Noire.

Nous autres, Italiens, nous ne pouvons pas nous désintéresser comme vous de la solution de la Question d’Orient. Les bruits qui courent nous font craindre que nous n’ayons à en subir du dommage. Si les grandes puissances se mettaient d’accord pour s’abstenir de toute conquête dans les provinces balkaniques, et convenaient que le territoire enlevé aux Turcs doit être laissé aux populations qui l’habitent, nous n’aurions rien à redire. Mais on affirme que la Russie, pour s’assurer l’amitié de l’Autriche, aurait offert à celle-ci la Bosnie et l’Herzégovine. Or, l’Italie ne pourrait permettre que l’Autriche occupât ces territoires.

Comme vous le savez, en 1866, le royaume d’Italie est resté sans frontières du côté des Alpes orientales. Si l’Autriche obtenait de nouvelles provinces, qui la rendissent plus forte dans l’Adriatique, notre pays se trouverait resserré comme dans des tenailles, et serait exposé à une invasion facile toutes les fois que cela conviendrait à l’empire voisin.

C’est vous qui devriez nous aider dans cette occasion. Nous sommes fidèles aux traités, et ne réclamons rien aux autres. Vous devriez, demain, dissuader le comte Andrassy de tout désir de conquêtes en territoire ottoman.

— L’Autriche, répondit le prince, suit en ce moment une bonne politique, et je suis convaincu qu’elle y persistera. Un seul cas pourrait se produire qui aurait de quoi rompre tout