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chef, décidés à obéir, à n’être que l’arme au service de celui qui pense pour eux, une arme terrible dont la force est décuplée par l’ardeur et la confiance.

Vers cinq heures, les premières lueurs éclaircissent la nuit ; le guide s’arrête : Wyma est là.

Maritz s’avance pour examiner la position.

Une ligne d’arbres, encore indistincte dans l’obscurité, barre l’espace comme un rempart d’ombre ; derrière, il distingue le point brillant d’un feu près de s’éteindre. Le campement des sofas est invisible, mais son emplacement est indiqué par la brousse abattue sur une surface de 30 mètres ; les branches coupées ont été utilisées pour former des abatis. Cette précaution n’a rien d’étonnant : toutes les fois qu’ils en ont le temps, les sofas se retranchent.

Le bivouac est endormi, il faut attaquer. D’un bond, sur un signe de leur chef, les tirailleurs franchissent l’espace débroussé. Une sentinelle ennemie se dresse devant eux, terrifiée ; d’un coup de revolver Maritz l’étend raide morte.

L’alarme est donnée. L’ennemi court aux armes ; en même temps, l’élan de l’assaut est brisé par les abatis ; la surprise n’est plus possible. Maritz commande le feu, un feu rapide, terrible, à 50 mètres.

Les sofas ripostent ; des détonations claquent, dispersées d’abord, puis le feu s’étend sur le front. Une double ligne d’éclairs illumine le brouillard bleuâtre que le soleil dissipera dans quelques minutes.

Maritz est étonné de la rapidité avec laquelle l’ennemi s’est ressaisi et lui a fait face, manœuvrant comme une troupe réellement commandée. L’affaire sera dure, mais il peut demander tous les efforts à ses hommes.

Une balle l’atteint. Il reste à son poste : il n’a pas d’officier pour le remplacer.

Cependant l’action traîne en longueur. De ses trente braves, plusieurs sont déjà hors de combat ; il faut en finir et arriver à l’assaut. Les tirailleurs sont parvenus à gagner du terrain à travers les abatis ; Maritz veut commander : A la baïonnette ! il reçoit une deuxième halle. En avant tout de même… Une troisième balle le traverse, et le couche à terre ; deux hommes l’emportent en arrière. Il se sent frappé mortellement ; il va abandonner ses tirailleurs… avant, du moins, il verra leur