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napoléonienne, Denon, chargé de pourvoir à la décoration du grand escalier du Musée, commandait à Gérard comme sujet de fresque u l’arrivée à Paris des monumens des arts conquis par le traité de Tolentino. »


Pour préparer le digne aménagement de tant de richesses, le Louvre ferma momentanément ses portes. On avait renoncé depuis le début de 1797 au vocable exotique ou pseudo-antique de Muséum, dont, par une destinée bizarre, devait hériter l’ensemble de collections, de chaires et de laboratoires d’histoire naturelle groupé dans le vénérable « Jardin des Plantes[1]. » Le Muséum français avait fait place au Musée central des arts, et la commission du Muséum à une organisation plus centralisée. Le conseil d’administration, composé de sept artistes avancés en âge[2], n’avait plus guère qu’un rôle consultatif : la direction effective appartenait à un administrateur, l’architecte Dufourny, assisté d’un administrateur-adjoint, Foubert, et d’un secrétaire, Lavallée. Au-dessous d’eux un commissaire-expert (Jean-Baptiste-Pierre Lebrun, mari de Mme Vigée-Lebrun), un garde des dessins (Morel d’Arleux), un marbrier-sculpteur, un expéditionnaire, douze gardiens-travailleurs et deux portiers extérieurs complétaient le personnel du Musée.

Comme toutes les administrations publiques, le Musée central des arts fut victime de l’effroyable pénurie financière qui demeure un des traits caractéristiques du gouvernement directorial. La vente des catalogues, grâce à la curiosité provoquée par les récens enrichissemens des collections, produisit en trois ans environ 34 000 francs, et permit de parer à quelques dépenses d’extrême urgence : mais sur les sommes régulièrement allouées par le budget, l’administration ne toucha que 1 000 francs en dix-huit mois. Dans la lettre où il se plaignait de ce retard, Dufourny représentait que les sept membres du

  1. Le bon Littré, plus lexicographe qu’historien, prononce d’un ton tranchant : « On ne dit pas : le Muséum du Louvre. » C’est vrai aujourd’hui, mais on l’a dit à la fin du XVIIIe siècle, et cette locution, qui se trouve encore en 1802 dans un arrêté du Premier Consul (Correspondance de Napoléon, 6439), a persisté dans le langage courant jusque sous l’Empire.
  2. A la fin de la période directoriale, les sept membres du Conseil étaient Jollain, Hubert Robert, Suvée, Barthélémy, Vien, Pajou et Moilte.