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vente à assurer des moyens d’existence à des vieillards des deux sexes. Elle vivait entourée de cinq ou six demoiselles de qualité à qui elle enseignait l’économie domestique en assignant à chacune une besogne hebdomadaire et en l’interrogeant sur la manière dont elle s’en était tirée. Comme il s’agissait de grandes filles, ces exercices pratiques étaient naturellement plus difficiles que ceux qui avaient appris à Catherine et a ses contemporaines le b a ba du ménage. On ne s’étonnera pas que la petite école ménagère de Mme de Brézal fut assiégée de postulantes, surtout quand on saura qu’on y apprenait aussi les arts d’agrément et que, tout en étant réglée comme un couvent, on y recevait la bonne compagnie, on y donnait des sauteries et d’autres distractions. Elevée à la campagne par un oncle désireux de faire éclore chez elle les heureuses semences que sa mère y avait déposées, Madeleine de Scudéry apprit toute seule la cuisine, l’économie rurale et horticole, un peu de médecine, l’art de composer des remèdes, de distiller des parfums, des produits utiles et agréables. Vives, dans son De institutione feminæ christianæ, recommande à la maîtresse de maison d’avoir une petite pharmacie domestique, et il est probable que plusieurs fabriquaient elles-mêmes les drogues dont elle se composait. Nous n’avons pas à entrer ici dans le détail des habitudes pratiques que l’on donnait à la jeune fille. Ce serait nous répéter. Nous nous contenterons de rappeler que Mme Acarie et Françoise de Chantal les firent entrer dans l’éducation de leurs filles et de signaler l’expérience qui en était souvent le résultat précoce. La sœur de Pascal, Gilberte, qui devint Mme Périer, n’avait pas encore quinze ans qu’elle tenait la maison de son père, qui était veuf. A seize, Claude du Chatel, qui épousa plus tard Gouyon de la Moussaye, était capable aussi d’en tenir une. Dans les établissemens d’enseignement public destinés au peuple, c’était moins l’enseignement ménager que l’enseignement professionnel qu’on avait en vue. Chez les Ursulines et chez les Augustines qui, avec les Visitandines, firent l’éducation de presque toutes les filles de la classe moyenne et de la classe élevée, le travail ménager était un peu subordonné aux travaux d’aiguille mais, en revanche, on y enseignait les connaissances nécessaires à l’administration d’une maison et d’une fortune.

Même dans la bourgeoisie, la femme ne dédaignait pas les soins les plus humbles du ménage. Celle d’André du Laurens,