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Des parfums, des reflets, du raisin de septembre ;
Les bonheurs que ce jour en mes yeux a laissés,
Et l’or doux de la lampe au plafond de ma chambre…
Ceci, quelques mots noirs vainement cadencés…


PREMIER BONHEUR


Le fragile bonheur qu’aujourd’hui m’a donné,
Je vous le dois. Il est tout jeune, il est sincère,
Il va vivre… De mes mains jointes je le serre
Silencieusement sur mon cœur étonné…
Ce n’est qu’un reflet d’aube et ce n’est qu’un présage :
De vous je ne sais rien sinon que je prévois
Des caresses dans vos regards et sous vos doigts,
Et je ne connais pas très bien votre visage,
Puisque au fond de mes yeux, ce soir, en les fermant,
Loin de vous je vous cherche encore vainement…
Pourtant je suis heureux de l’ombre et du silence,
Et j’écoute l’accent persuasif et doux
Que prennent mes désirs pour me parler de vous.
Voici que le prodige éternel recommence,
— L’âme des roses reste aux rosiers engourdis, —
Et j’invente pour vous des mots souvent redits…
Que m’importe comment les floraisons s’achèvent :
Tout l’avenir s’émeut lors des éclosions,
Et, grâce à vous, ce soir, content d’illusions,
Je crois au renouveau délicieux des rêves !
Car ce n’est pas encor la fièvre et le tourment,
Mais l’éveil d’une joie indéfinie et tiède,
Un tranquille plaisir fait d’attendrissement,
Une tentation d’aimer, à qui je cède…


NE LES CROIS PAS


Les pauvres, les jaloux, ceux que l’amour déserte,
Prédiront, si jamais tu parles de nous deux,
Que tu n’auras, après le plaisir hasardeux,
Que la déception d’être moins inexperte…