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Moulay-Hafid et qu’il faillit tomber aux mains des troupes françaises de la Chaouïa. Il est mort à l’heure actuelle, et son fils a fait sa soumission. La route est à peu près libre ; elle ne présente qu’un seul parcours de quatre jours sans eau ; l’obstacle n’a jamais arrêté le courant d’échanges entre les deux pays, l’étape est ordinaire pour les chameaux des caravanes. Il suffira de creuser quatre puits pour la rendre praticable à tous les convois. Nos tirailleurs se familiariseront bientôt avec la nouvelle ligne de pénétration ; leur marche précédera l’émigration continue et fructueuse des travailleurs à la recherche de salaires agricoles et des marchands, colporteurs de noix de kola, « Dioulas, » Maures et Peuhl conducteurs de troupeaux.

Les noirs ne sont pas rares au Maroc et principalement dans la vallée du Sous. Lorsque cette région, définitivement reliée à la Mauritanie, servira de débouché naturel au trop-plein des populations de l’Afrique Occidentale, la création d’une armée noire sera peut-être l’aboutissement logique d’une politique bien entendue. Cette armée pourra pacifier et garder le Sud du Maroc à Marrakech, Agadir, Mogador et Sali. La construction de la voie ferrée Oudjda-Taza-Fez-Marrakech mettra les troupes sénégalaises à trois jours d’Oran, quatre jours d’Alger, cinq jours de Constantine et six jours de Tunis. Mais pour le moment, qu’on se borne à recruter le nombre de bataillons suffisant pour aider la métropole dans l’effort militaire qu’elle doit produire pendant quelques années. Jusqu’à ce jour, la question de l’infanterie a fait oublier les autres armes. Par une mesure d’économie assez mesquine, on a réduit à un seul escadron ces magnifiques spahis sénégalais dont la bravoure s’est affirmée sur tous nos champs de bataille du Soudan. L’artillerie coloniale trouve parmi les indigènes des auxiliaires précieux. Il y aurait tout avantage à constituer des escadrons noirs et des batteries mixtes au Maroc. Mais le bon sens indique très clairement que si les troupes sénégalaises peuvent rendre des services dans une expédition coloniale, leur constitution et leur genre d’existence ne les ont nullement préparées à l’occupation de l’Algérie, encore moins à la guerre européenne.