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directeur du laboratoire et, ne respectant même pas le sexe, s’en prirent aussi à rattachée Mlle B… ; ils demandaient 20 000 francs de dommages-intérêts sous prétexte qu’avait été commise une faute lourde entraînant la responsabilité des agens. Le préfet de l’Isère formule alors un déclinatoire d’incompétence que le tribunal de Grenoble accueille favorablement ; B…, l’industriel, a beau faire appel, le tribunal des conflits décide l’année suivante que l’allaire en question ne concerne pas l’autorité judiciaire, qu’il s’agit d’un service public et administratif fonctionnant à l’aide d’un personnel régulièrement nommé. Il est évident que, sans cette interprétation, bien des tentatives de répression de fraudes seraient étouffées dès l’origine.

Si, en France, au sentiment des fraudeurs, les laboratoires d’analyse nuisent en diffamant, il n’en est pas de même dans les Pays-Bas. A Amsterdam on recourt au moyen inverse ; on publie dans les journaux les résultats d’analyse des denrées alimentaires avec le nom et l’adresse du débitant, ce qui constitue assurément la meilleure des réclames. On usait, paraît-il, au moyen âge, en Brabant, d’un procédé plus cruel et plus radical ; la guerre contre la fraude était si acharnée que les mouilleurs de vins trop éhontés se voyaient trancher le doigt, tout simplement.


II

Les eaux minérales ne servent pas exclusivement aux malades, car les gens bien portans en consomment des quantités toujours croissantes. Il existe à leur sujet une réglementation très sévère, très ancienne et assez compliquée.

C’est l’Académie de Médecine, succédant à la Société royale de médecine de l’ancien régime, qui après analyse, examen et rapport favorable, décide si une eau récemment découverte peut être distribuée ou interdite. Jadis c’était le gouverneur de la province qui servait d’intermédiaire auprès de la Société royale ; à présent, c’est le préfet qui transmet la demande à l’Académie. Ce n’est que sous Louis XVIII qu’on a visé dans la législation les eaux factices ou artificielles telles que les eaux gazeuses : ce sont les seules dont nous ayons à parler. Suivant les techniciens compétens, la surveillance laisse encore à désirer : le public, se voyant présenter un liquide limpide dans