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sur Madagascar étaient perpétuellement combattus. L’opposition entre les Affaires étrangères et la Marine ne procédait pas d’une appréciation différente de chaque cas particulier. Deux tendances très nettes existaient dans le gouvernement français d’alors, dès qu’il s’agissait de questions coloniales. Après s’être plus ou moins manifestées au cours des affaires que nous avons résumées, elles vont maintenant, lors du débat sur Madagascar, mettre directement aux prises les deux ministères qui les représentaient.

Ce débat s’engagea vraisemblablement, je l’ai dit, dans le Conseil du 7 janvier 1843. L’amiral Duperré dut lire alors à ses collègues réunis sous la présidence du Roi la Note préparée par ses services. Reprenant les conclusions de l’amiral de Hell, cette note proposait, on s’en souvient, de réaliser sans délai l’occupation de Mayotte, mais pour un double but : procurer immédiatement un excellent point d’appui à nos bâtimens et, en même temps, préparer notre installation complète à Madagascar. Ce fut presque certainement ce dernier point qui provoqua une discussion digne de n’être pas oubliée par les historiens de notre expansion lointaine. Rien ne permet toutefois de la reconstituer positivement. Nous ne savons même pas si le Roi y intervint, non plus que le président du Conseil ou la plupart des assistans ; mais qu’il y ait eu discussion demeure incontestable, tout comme l’opposition entre le ministre de la Marine et celui des Affaires étrangères. Le premier soutint la politique d’action et de conquête à laquelle la Direction des Colonies demeurait traditionnellement attachée, le second la combattit et par des argumens que nous devinons aisément : pour savoir qu’elles étaient en pareille matière et à cette époque précise les idées de Guizot, il suffit en effet de compléter un passage de ses Mémoires par deux discours parlementaires et par les allusions très claires de quelques pièces officielles.

Son passé et son éducation politique le portaient vers les problèmes classiques de la diplomatie européenne, et, s’accordant à merveille en cela avec les habitudes invétérées de son département ministériel, il était toujours tenté de considérer les entreprises lointaines comme accessoires et subordonnées. En outre, partisan de l’entente cordiale avec l’Angleterre, sa politique était dans une large mesure conditionnée par la préoccupation de ne rien faire qui pût troubler les bons rap-