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de Chine après avoir été y étudier les textes sacrés. Ils fondèrent des sectes très nombreuses : Hossô, Sanron, Jôjitsu, Kegon, etc., parmi lesquelles l’école Mikkyô ou mystique tint une place toute particulière. Par leur intermédiaire, la culture chinoise des Tang parvenue à son apogée commença à rayonner sur le Japon et, suivant la jolie comparaison d’une antique poésie, la capitale, « Nara, la verdoyante, s’épanouit comme une fleur embaumée. » Ce fut désormais la Nara-no jidai ou « époque de Nara. »

Les peintures qu’elle inspira sont malheureusement assez rares, et ceci peut s’expliquer par cette observation que l’architecture et la sculpture étaient alors jugées plus facilement utilisables pour l’instruction des foules. N’en a-t-il pas d’ailleurs été de même durant une bonne partie de notre moyen âge ? On ne sait plus rien des cinquante sortes de paravens et d’écrans peints portant des paysages et des scènes de fêtes énumérés dans le registre des offrandes du Tadaiji, non plus que des quatre-vingt-dix effigies de Rakkans décrites par celui du Daiôji.

De rares peintures ornant des panneaux de chasse montrent l’empreinte très sensible du style des Tang et ont déjà presque entièrement perdu les caractéristiques des fresques de Horyûji. L’artiste s’attache alors surtout à exprimer une idée principale, celle qu’on appelait alors Yemman (vertu pleine et entière), sans chercher à donner aux images des dieux une individualité quelconque. Le trésor du Shôsoin conserve une admirable peinture exécutée à l’encre de Chine sur toile de chanvre (Kokka n° 216, mai 1908) où l’idéal nouveau se trouve quintessencié. Cette esquisse sommaire, mais pleine de promesses, ne tire ses effets que de la vigueur du coup de pinceau et de la sobriété du trait affectionnés des maîtres Tang. La divinité portée sur un nuage est très remarquable par sa physionomie largement indiquée et l’aisance du mouvement de ses bras. Tout autour d’elle de longues écharpes s’envolent et viennent encore ajouter au charme de l’effet décoratif obtenu dans cette peinture caractéristique de l’ère tempyô (729-748).

Il est non moins important de signaler l’éclosion de tendances vraiment japonaises très probablement nées de la transformation des élémens artistiques coréens des époques précédentes. Les peintres semblent s’être alors reposés de la solennité des images de Bouddhas et de Bosatsu, en représentant des divinités