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importantes. En Hongrie, le total en était plus fort, mais il ne semble pas que la proportion des retraits ait été aussi élevée. Quels qu’aient d’ailleurs pu être les chiffres, le fait est avéré, et les mouvemens significatifs des changes ont démontré, d’une façon évidente, l’importance des ressources ainsi rapatriées à Paris.

Contrairement à ce qu’il eût été naturel de supposer, ce reflux de capitaux en France n’a pas eu pour effet immédiat d’y améliorer la situation du marché financier. Les craintes de complications politiques étaient vives : les établissemens de crédit et les banques privées restreignaient le crédit ; les particuliers retiraient leurs fonds chez les uns et les autres, ainsi qu’aux caisses d’épargne, où l’excédent des retraits depuis le 1er janvier atteignit 150 millions de francs : il en résultait une diminution des disponibilités et une raréfaction de l’or qui ne s’étaient point manifestées depuis de longues années. Au milieu de ce malaise, qui, dans certains cas, devenait de l’effarement, la Banque de France a su garder une attitude impeccable ; elle a donné l’exemple du sang-froid ; elle a continué à escompter tout le papier commercial qui lui était présenté ; si elle a discrètement engagé certains cliens à réduire leurs offres de papier financier, c’est-à-dire représentant des ouvertures de crédit et non des échanges de marchandises, elle a donné libéralement l’or qu’on lui demandait, et elle a traversé la période aiguë de la crise en se bornant à élever d’un demi pour 100, de 3 à 3 1/2, le taux de ses escomptes, et de 3 1/2 à 4 celui des avances sur titres. Grâce à cette politique, le commerce français n’a pas éprouvé de difficultés : seules, les transactions financières proprement dites ont été ralenties ; l’escompte du papier qu’elles engendrent s’est pratiqué pendant plusieurs semaines à un taux supérieur à celui de la Banque de France, à 3 3/4, 3 7/8 pour 100, alors que tout le papier commercial trouvait son chemin à 3 1/2 dans le portefeuille de cette dernière : du 15 juin au 10 octobre 1911, ce portefeuille a passé de 1 022 à 1 541 millions, augmentant de plus d’un demi-milliard de francs.

Les mouvemens du taux d’escompte ont eu bien moins d’amplitude qu’en 1907. Le taux de 3, qui était en vigueur à Londres depuis le 9 mars 1911, n’a été porté qu’à 4 pour 100 le 21 septembre et ne s’est plus élevé au-dessus de ce niveau. A Berlin, la Banque de l’Empire a passé de 4 à 5 pour 100 en septembre et a pu terminer l’année sans dépasser ce dernier niveau,