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parmi ces braves. L’usage est maintenant établi que la fête du 14 juillet s’ouvre, au cimetière, par un hommage aux disparus ; le cortège, en se rendant au mausolée, salue au passage en même temps les Chiliens et les Français tombés victimes du devoir.

Tout récemment, aux environs de Santiago, sur un terrain donné par deux compatriotes qui rentrent en France après avoir vaillamment acquis leur indépendance, MM. Biaut, a été posée la première pierre d’une maison de retraite de la colonie ; on l’appelle « le foyer français ; » ce sera, dans un site riant, sur les pentes d’une colline largement aérée, un tranquille atelier de famille pour des vieillards valides, et un asile temporaire pour les convalescens ; tous les frais ont été couverts par des libéralités privées ; des Chiliens ont tenu à en prendre leur part, et l’offre la moins touchante ne fut pas celle des ouvriers du village voisin, la « poblaciôn Biaut, » qui ont donné dix mille briques pour aider à la construction. « Ceci sera ma dernière œuvre, » disait non sans mélancolie M. Paul Desprez aux amis qui l’en remerciaient ; en ce jour d’inauguration, qui fut aussi celui des adieux, le ministre avait reçu de chaleureux télégrammes des résidens français de Tacna, d’Iquique, de Coquimbo, de Concepcion, de Punta-Arenas. Le gouvernement avait, pour cette circonstance, prêté la musique militaire d’un de ses régimens d’élite ; on écouta, tête nue, la Marseillaise et l’hymne chilien ; la cérémonie prit fin aux accords de Sambre-et-Meuse.

Jamais, mieux qu’après ces manifestations qui l’ont révélée capable d’une action solidaire, la colonie française n’a été plus justement populaire au Chili ; jamais moment ne fut plus favorable pour resserrer ces amitiés et leur faire prendre une forme concrète. Le Chili possède une élite intellectuelle des plus instruites ; ses services, militaires et civils, de cartographie et de « mesure des terres » ne le cèdent pas aux meilleurs de l’Europe ; l’an dernier, au Congrès Scientifique International de Buenos-Aires, les rapports de la délégation chilienne furent multiples, divers et très remarqués. Aux premiers rangs du monde universitaire figurent des savans et des lettrés, des juristes, des médecins dont les meilleurs maîtres d’Europe s’honoreraient d’être les collègues ; la plupart disent très haut leurs sympathies pour la culture française ; on