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membres qui examinera l’accord. Tous les anciens présidens du Conseil qui siègent dans cette Assemblée, à l’exception de M. de Freycinet et de M. Combes, un grand nombre d’anciens ministres, bon nombre d’ambassadeurs et de ministres plénipotentiaires, en font partie, et ils la dotent d’une compétence exceptionnelle. Espérons que la réunion de toutes ces lumières projettera quelque jour sur les ombres qui n’ont pas été dissipées. Car M. Caillaux a témoigné, à tout venant, l’ardent désir de ne pas souffrir, autour de la convention, ni en ses origines, ni en ses péripéties, ni dans ses causes, ni dans ses conséquences, rien de dissimulé, de déguisé, de vague ou d’équivoque. Toutefois il n’a pas répondu aux questions de M. de Mun. Pourquoi le Panther est-il allé à Agadir ? Pourquoi l’accord du 9 février 1909 a-t-il été subitement déchiré ? Quand et comment a-t-on été conduit à payer du Congo le protectorat du Maroc ? D’où vient cette pluie, ce déluge de traités, d’articles et de post-scriptum secrets ? Au moins, est-ce bien tout ? Le gouvernement brûlait de nous le dire. Mais le débat est clos à la Chambre, le scrutin est acquis, et nous ne le savons toujours pas.

Nous ne savons pas davantage pourquoi, comment, dans quelles conditions notre ministre des Affaires étrangères proposa au gouvernement espagnol, en 1902, l’arrangement, le projet de partage auquel M. Silvela refusa de souscrire, en dépit de la promesse qu’il avait faite à M. Sagasta, en dépit de tout ce que l’Espagne y eût gagné, par crainte que « l’appui diplomatique de la France » fût insuffisant à couvrir l’Espagne des risques qu’elle courait à négocier et à traiter en arrière de l’Angleterre, et parce que, probablement, la part qu’on lui offrait était telle qu’elle dépassait ses moyens, si elle comblait, et bien au-delà, ses plus orgueilleuses ambitions. Nous ne savons pas si le texte publié par le Figaro le 10 novembre, il y a six semaines, est le vrai, s’il est à lui seul toute la vérité, ou s’il n’y a pas, quand même, quelque chose de vrai dans le texte, très différent, publié par le Correspondant en décembre 1903, il y a huit ans. Jamais ces négociations n’ont abouti, elles n’ont jamais pris une forme définitive, c’est entendu ; mais elles n’en peuvent pas moins gêner les négociations d’aujourd’hui. Il ne serait pas indifférent, entre autres choses, que nous eussions ou n’eussions pas accepté, à aucun degré ni à aucun moment, d’établir au Maroc une espèce de condominium avec l’Espagne, que nous eussions ou n’eussions pas admis l’hypothèse d’un Maroc bicéphale, ou divisé en deux’ sphères d’influence, dans chacune desquelles le Sultan aurait eu une main