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K couronnés à l’impériale, enrichis de branches de lauriers, petits enfans nus et trophées d’armes antiques (1565).

Sauf quelques étrangers auxquels il fallait, pour les attirer, faire des conditions avantageuses, — tels étaient alors par exemple les Florentins employés aux ouvrages de stuc, à raison de 320 francs par mois, — les « artistes, » peintres ou sculpteurs, qui ont décoré les hôtels et les châteaux des derniers siècles, touchaient des salaires un peu plus que doubles de ceux des manœuvres. Leur nombre, par rapport à une clientèle restreinte, ne leur permettait pas de monnayer plus haut leur talent. Aujourd’hui au contraire, la foule des amateurs millionnaires qui achètent les tableaux et les bustes, se refusent à commander des objets d’art immobiliers en bois, en pierre ou en bronze, parce qu’ils les jugent trop coûteux, Aussi ne s’est-il rien fait, au XIXe siècle, qui puisse être mis en parallèle avec des boiseries comme celles de l’hôtel de La Vrillière, dans la galerie fameuse où se tient annuellement l’assemblée des actionnaires de la Banque de France.

La mode y est aussi pour quelque chose : nos contemporains sont plutôt bibelotiers que créateurs et, moins sûrs de la stabilité des situations acquises, ils sont plus pressés de jouir que leurs aïeux. Qui voudrait de nos jours mettre dix-huit ans à installer son salon, comme le maréchal duc de Croy sous Louis XV ? Il avait loué rue du Regard un hôtel tout bâti, avec le droit de mettre son nom sur la porte. « Ainsi, dit-il, sans dépense, je me faisais un superbe Hôtel de Croy à Paris, où il n’y en avait jamais eu. »

Après avoir travaillé depuis 1752 à la décoration de son rez-de-chaussée, il se félicite en 1770 que « son salon soit enfin fini à la dorure près. Il était superbe, ajoute-t-il, de bon goût, et ce n’avait pas été sans peine ; car il avait fallu tâtonner pour si bien réussir, mon fils et moi, ayant été obligés de faire changer bien des choses. Les tableaux en bas-reliefs, les médaillons, les portes, furent des objets où nous eûmes honneur. La grande chambre à côté, différemment meublée et l’antichambre achevée, furent très admirées, étant à grande perfection. C’était du beau et du cher… »

Ces confidences nous initient à la collaboration intime des grands seigneurs avec les artistes du XVIIIe siècle, d’où sont sortis ces hôtels du faubourg Saint-Germain, déjà en grande partie