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Lorsque Mrs Stowe vint en Angleterre pour pousser son succès, lady Byron fut, parmi les membres de l’aristocratie britannique, une des rares personnes chez qui le cant de l’authoress américaine trouva de l’écho et de la sympathie. Leur bonté comme leur religion était faite à peu près du même métal : elles se comprirent immédiatement et devinrent amies. A un second voyage que fit Mrs Stowe en Angleterre, lady Byron lui fit, toujours « sous le sceau du secret, » le récit des événemens dont elle avait été le témoin et la victime. Mrs Stowe avait promis de se taire, mais, quelques années après la mort de lady Byron, lorsque Mme Guiccioli, veuve de son second mari, le marquis de Boissy, réunit en deux volumes ses souvenirs sur lord Byron, où elle accusait lady Byron d’avoir manqué, envers lui, d’intelligence et de sympathie, Mrs Stowe crut devoir venger la mémoire de son amie en publiant ce qu’elle appela The true Story of lady Byron. La conversation qu’elle avait eue avec cette dame y était noyée dans un long sermon. L’effet ne fut pas celui qu’elle attendait. La critique traita sévèrement ce pamphlet, qui fut jugé plus scandaleux qu’édifiant, et dont aucune preuve n’appuyait les révélations. Dans un volume intitulé Lady Byron vindicated, la famille fit désavouer Mrs Stowe, tout en admettant, tout en suggérant, comme une conclusion inévitable, la culpabilité d’Augusta, sans en fournir aucune preuve directe et positive. L’émotion causée par cet incident et par les mouvemens en sens divers auxquels il avait donné lieu se calma peu à peu et, à partir de 1870, le silence se fit autour de Byron : le silence de l’oubli plutôt que celui du respect. Sa gloire littéraire, pendant les années qui suivirent, n’a cessé de décliner, tandis que s’élevait, chaque jour plus haute et plus brillante, celle de Shelley. La position que, vivans, ils occupaient aux yeux de leurs contemporains, celle qu’ils s’accordaient à eux-mêmes est renversée et, s’ils revenaient au monde, ils trouveraient qu’ils ont échangé leurs places. Shelley serait peut-être le plus étonné des deux, car cet homme étrange appartenait à cette curieuse famille d’esprits : les orgueilleux modestes.

Quoi qu’il en soit, il semblait que nous n’eussions plus rien à apprendre sur Byron et qu’il ne nous restât aucune curiosité à son sujet, lorsque son petit-fils, lord Lovelace, a publié, en 1905, ce livre d’Astarté qui a, soudainement, ramené