Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 7.djvu/685

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nouveau service, on a proclamé hautement que l’aviation n’était le monopole d’aucune arme, qu’en matière aussi nouvelle il fallait faire appel à toutes les bonnes volontés ; malgré ces belles paroles, l’inspection permanente d’aéronautique n’est qu’une étiquette trompeuse, et c’est toujours le Génie qui a la haute main sur notre flotte aérienne. Or, en se rappelant comment cette arme a, dans ces dernières années, semblé prendre à plaisir d’entraver les progrès de notre aéronautique militaire, on peut tout craindre pour l’avenir, lorsqu’on la voit, encore aujourd’hui, maîtresse des destinées de notre flotte aérienne.

Faut-il donc déclarer, comme dans une opérette bien connue, que ce n’était pas la peine assurément de changer de gouvernement ? Faut-il proclamer, après un an d’expérience, la faillite de l’organisation actuelle de notre service d’aéronautique ? C’est peut-être ce que quelques-uns pensent ; je suis, pour mon compte, d’un avis tout à fait opposé, et vais essayer de faire partager ma conviction au lecteur.


II

Notre flotte aérienne doit-elle être constituée de dirigeables ou d’aéroplanes ? C’est une discussion déjà ancienne, et je l’ai poussée suffisamment à fond l’année dernière pour me dispenser de la reprendre complètement aujourd’hui ; je me bornerai à rappeler les points fondamentaux de la question, et à en faire l’application à l’état actuel de l’aéronautique.

L’aéronef militaire idéal, c’est-à-dire celui auquel on demandera d’exécuter de grandes reconnaissances stratégiques, ayant pour but de renseigner notre état-major sur les positions occupées par les armées ennemies, devra, pour remplir sa mission, posséder un rayon d’action d’au moins 600 kilomètres ; il devra, en outre, pouvoir passer la plus grande partie de son voyage aérien à une altitude supérieure à 1 500 mètres, pour avoir des chances sérieuses d’échapper aux projectiles ; il devra, enfin, posséder une vitesse propre, c’est-à-dire, par rapport à l’air ambiant supposé immobile, aussi considérable que possible.

Sous ce dernier rapport, les aéroplanes ont, dès leur naissance, possédé une supériorité incontestable sur les dirigeables ; depuis, leurs vitesses se sont augmentées, celles des dirigeables aussi, mais dans des proportions moins fortes. S’il n’y avait pas