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fiançailles. Te rappelles-tu qu’à Blankenburg, je te fis tenir, pour ton jour de naissance, une bague de diamans dans une branche de fleurs ! Et que tu perdis, à Düsseldorf, un des diamans, que quelqu’un retrouva ! Ce sont là des souvenirs bénis !… »


Quelques lettres encore : deux à Mme Schumann, deux à Joachim, trois à l’éditeur Simrock, la dernière en date du 13 avril 1855… Et le reste est silence.

Qui racontera la fin des musiciens illustres ! Oh ! comme il serait émouvant, ce mémorial funèbre ! Il évoquerait avant toute autre la pieuse, la sainte mort d’un Palestrina. Ce serait ensuite la mort patriarcale d’un Sébastien Bach ; puis la jeune mort, et, sous la neige de décembre, les tristes funérailles d’un Mozart. Malade de chagrin, sa veuve n’y put assister et ses amis ne le suivirent même pas jusqu’au cimetière. Il y entra seul et, dans la fosse commune, sa dépouille sacrée fut mêlée à des restes sans gloire. Noble, héroïque avec simplicité fut le trépas de Haydn, au bruit de nos canons, après cette suprême prière : « Que Dieu sauve l’empereur François ! » Un formidable orage accompagna l’agonie à peine moins terrible de Beethoven. Un palais de Venise reçut le dernier soupir de Wagner, et le génie de Schumann, enseveli sous les flots du Rhin, les fait mélodieux à jamais.


CAMILLE BELLAIGUE.